Summary: | Les discussions sur l'accord du participe passé en français ne datent pas d'aujourd'hui. En fait, elles remontent à l'époque où les langues vulgaires s'affirmaient et où le francien, dialecte de l’Île-de-France, est devenu langue officielle sous l'influence du pouvoir royal. C'est au seuil du XVIe siècle que, de dialecte, le francien est devenu langue, le français. En 1539, l'Ordonnance de Villers-Cotterêts substitue le français au latin dans les jugements, les actes notariés et les registres d'état-civil. C'est une première reconnaissance du français. Les grammairiens tentent alors de faire une grammaire en codifiant la langue vulgaire, en la fixant par des règles. Leur tâche n'est pas facile, car la langue n'est pas stable. Malheureusement, au lieu d'étudier la langue moderne dans sa réalité, ils ont toujours recours au latin, qui demeure la langue de prestige. Jusqu'alors, le français était surtout une langue parlée: par son entrée dans les documents juridiques, il allait être imprimé et deviendrait donc une langue lue. C'est alors que François Ier (1494-1547), qui avait fondé l'imprimerie nationale, s'informa de la variation du participe passé auprès de Marot, bien que celui-ci ne fût pas grammairien. En effet l'accord se faisait ou ne se faisait pas. Par exemple, dans (j’ay letres escrites, la personne qui a écrit n'est pas obligatoirement celle qui a les lettres. Il semble que ai escrites n'était pas un temps composé, c'est pourquoi escrites s'accordait avec letres en tant qu'épithète. Mais, on pouvait avoir aussi escrit ay letres où escrit bien que participe, restait invariable. D'après Brunot (La pensée et la langue, p. 324), "c'est une question d'ordre des mots." En ancien français, il arrivait que le déterminé reste invariable s'il précédait son déterminant. Ce qui explique qu'on pouvait rencontrer escrit ay letres. Lorsque l'auxiliaire et le participe formèrent un temps composé qui n'avait qu'un seul sujet, l'accord continua à se faire selon la tradition. Cependant, les cas où il ne se faisait pas étaient de plus en plus nombreux. Il fallut que François 1er questionne Marot sur cette variation du participe pour que naisse la règle que nous connaissons. Pour la formuler, Marot a puisé dans la langue ancienne tout en prenant exemple de l'italien. Malgré les protestations du grammairien Meigret, la règle fit son chemin, aidée par Malherbe et Vaugelas. Celui-ci posa deux règles fondamentales basées sur l'ordre des mots: I. J’ai reçu les lettres; II. Les lettres que j'ai reçues. [...]
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