Blaise pascal Apologie et probabilités

• Main Author: Bras, Mathieu
• Format: Others
• Language: fr
• Published: University of Ottawa (Canada) 2013
• Subjects: Philosophy.
• Online Access: http://hdl.handle.net/10393/29820; http://dx.doi.org/10.20381/ruor-19928

Nous nous sommes proposé d'examiner dans le présent travail un double objet. Le premier touche la définition d'un cadre interprétatif capable de restituer une certaine cohésion méthodologique aux Pensées de Pascal---à travers, notamment, deux usages pascaliens de la notion de probabilité. Un premier usage est discerné dans la tentative pascalienne de dégager des éléments d'évidence capables de conférer un certain degré de vraisemblance à la religion chrétienne---en une démarche qui nourrit quelque rapport avec le probabilisme des casuistes: nous examinons à cette occasion le rapport complexe et conflictuel de la pensée pascalienne vis-a vis de cette doctrine morale. Les Pensées mettent en oeuvre une seconde notion de la probabilité, qui réfère au sens moderne de ce mot. Ainsi Pascal investit-il, au fragment 418 des Pensées (ou "pari de Pascal") un calcul de probabilité, démontrant qu'il est plus avantageux de tenir pour la probabilité de l'existence de Dieu qu'en faveur de la probabilité contraire. Ces deux usages pascaliens de la probabilité définissent une unité thématique de la méthode de l'apologie. En effet, il s'agit toujours d'initier à un abord rationnel de l'aléa qui permette la décision. En outre, les deux procédés se complètent matériellement. La où le pari démontre l'avantage qu'il y a à parier pour Dieu, le "probabilisme" tente d'assurer que cette probabilité de l'existence de Dieu est la plus sure, au regard de probabilités concurrentes. Ce cadre interprétatif établi, nous évaluons ce double procédé de l'apologie au regard de ses objectifs: ramener les incrédules à la religion chrétienne---second objet du présent travail. Quant au procédé le plus déterminant de l'apologie (celui du fragment 418 des Pensées), force est de constater qu'il échoue à persuader, y compris ceux qui en admettent la validité et le caractère démonstratif. Sans ecarter les explications qui attribuent cet échec de l'argument à la subjectivité du joueur (celui-ci ne perçoit pas l'avantage defini par la règle), nous contestons en revanche leur statut de justifications exclusives. Nous proposons une hypothèse alternative, qui met l'échec du pari en rapport avec une difficulté plus générale des arguments philosophiques importants (d'ordre métaphysique, notamment), touchant leur capacité à persuader.