Summary: | La recherche dans le domaine de la mémoire sémantique a permis de documenter l’effet de concrétude (avantage pour les mots concrets relativement aux mots abstraits), et plus récemment, l’effet de concrétude inverse (avantage pour les mots abstraits relativement aux mots concrets). Ces effets, observés chez le sujet sain et dans différentes populations cliniques en neurologie, ont suscité de nombreuses interprétations théoriques, autant sur le plan cognitif que neuroanatomique. En effet, cette double dissociation entre les deux types de concepts suggère que leur traitement doit reposer au moins en partie sur des processus mentaux et neuroanatomiques distincts. Néanmoins, les origines de ces différences restent largement débattues et sont caractérisées par une absence notable de consensus.
L’objectif principal de la présente thèse est d’explorer les substrats cérébraux sous-tendant la compréhension des concepts concrets et abstraits. Dans un premier temps, un article de revue de la littérature dresse un état des lieux des connaissances actuelles portant sur le traitement sémantique des mots concrets et abstraits ainsi que sur leurs fondements cérébraux. Cet article met une emphase particulière sur les différences inter-hémisphériques dans le traitement des mots concrets et abstraits (Article 1). Dans un deuxième temps, une étude expérimentale de la compréhension des mots concrets et abstraits a été réalisée auprès de populations cliniques rares, des patients ayant subi soit i) une résection unilatérale de la partie antérieure du lobe temporal (temporo-polaire), soit ii) une résection unilatérale de la région hippocampique (temporale interne) (Article 2).
Le premier article fait ressortir la grande hétérogénéité des résultats dans le domaine, et suggère que les différences observées dans le traitement des mots concrets et abstraits peuvent difficilement être interprétées seulement en termes de différences inter-hémisphériques. Les résultats du second article indiquent qu’une lésion de la région temporale antérieure gauche ou droite entraîne une atteinte plus marquée des concepts concrets comparativement aux abstraits, alors qu’une lésion unilatérale des régions temporales internes affecte de manière équivalente le traitement sémantique des deux types de concepts. Les implications théoriques et cliniques de ces résultats sont discutées, ainsi que les limites et perspectives futures. === Research in the field of semantic memory has allowed to document the concreteness effect (advantage for concrete words relative to abstract words), and more recently, the reversal of the concreteness effect (advantage for abstract words relative to concrete words). These effects, observed in healthy subjects and in different clinical neurological populations, have yielded numerous theoretical interpretations, both on cognitive and on neuroanatomical levels. Indeed, this double dissociation between the two kinds of concepts suggests that their processing relies at least partly on distinct mental and neuroanatomical bases. Nevertheless, the origins of those differences remain largely debated and are marked by a notable lack of consensus.
The principal goal of the present thesis is to explore the cerebral substrates underlying the comprehension of concrete and abstract concepts. First, a literature review summarizes current knowledge about the processing of concrete and abstract concepts as well as their neural bases. This article emphasizes in particular the inter-hemispheric differences in the processing of those concepts (Article 1). Secondly, an experimental study of the comprehension of concrete and abstract concepts was conducted with a rare clinical population, patients who have undergone either i) a unilateral resection of the anterior part of the temporal lobe (temporal pole), either ii) a unilateral resection of the hippocampal region (internal temporal structures) (Article 2).
The first article highlights the important heterogeneity of the results in the field, and suggests that the observed differences in the processing of concrete and abstract concepts can hardly be explained solely in terms of inter-hemispheric differences. Results of the second article indicate that damage to anterior temporal regions, either left or right, can cause a more pronounced deficit of concrete concepts, as compared to abstract concepts, while damage to internal temporal regions affects the semantic processing of both kinds of concepts in an equivalent way. The theoretical and clinical implications of these results are discussed, and the limits and future research perspectives are also addressed.
|