Summary: | Au cours des dernières années, les groupes d’extrême droite ont gagné une visibilité grandissante dans l’espace public au Canada comme ailleurs. Alors que chercheurs comme journalistes tentent de mieux comprendre cette mouvance diverse et évolutive, la littérature scientifique disponible demeure avant tout axé sur les groupes et les tendances plus que les mécanismes et les trajectoires individuelles. Ainsi peu de recherches sont venues s’intéresser aux processus dynamiques qui amènent les individus à rejoindre ou à quitter ces groupes. La présente recherche appréhende les trajectoires de désengagement de treize anciens membres de groupes extrémistes de droite canadiens et met en lumière leur point de vue sur ce vécu. À partir d’une méthodologie de récits de vie, nous mettons en perspective l’engagement et le désengagement de ces individus hors de différents groupes d’extrême droite et explorons le rôle du soutien social dans leurs parcours.
Alors que les chercheurs tentent de comprendre le désengagement de l’extrémisme en puisant dans les connaissances sur les thématiques de désistance et désaffiliation de groupes criminels, ou encore le désengagement de groupes marginaux, les thèmes abordés par nos sondés nous ont amenés à prendre un pas de côté et mobiliser plutôt la littérature sur le soutien social l’autodéveloppement (mutual aid and self-help). Développée autour des groupes d’entraide entre pairs de type Alcoolique Anonymes (AA), cette littérature nous permet de toucher du doigt des éléments jusqu’à présent peu explorés des trajectoires de désengagement, c’est-à-dire les différentes composantes du soutien social : le soutien affectif, l’intégration sociale (ou le soutien du réseau), le soutien à l’estime de soi, l’aide tangible, le soutien informatif et l’opportunité d’aider les autres (Cutrona & Russel, 1990).
Bien que largement idiosyncrasiques, les résultats de cette recherche démontrent que les trajectoires de sorties de l’extrémisme de droite sont parsemées de points de convergence. L’importance du soutien apporté par les proches (parents, conjointes, ami-e-s), la mise en valeur du savoir expérientiel via l’utilisation du modelage et l’opportunité d’aider les autres comme une façon de s’aider soi-même, sont quelques facteurs facilitant le désengagement qui sont explorés dans ce mémoire. === In recent years, far-right groups have gained increased visibility in Canada and elsewhere. While researchers and journalists alike are trying to better understand this diverse and evolving movement, scientific literature remains primarily focused on groups and trends rather than individual mechanisms and trajectories. As a result, little research has been done on the dynamic processes that lead individuals to join or leave these groups. This research examines the disengagement trajectories of former members of right-wing extremist groups in Canada and highlights their perspectives on this experience. Based on the life stories of thirteen former members, our paper will put into perspective their engagement and disengagement out of different far-right groups, and will explore the role of social support in their journeys.
While researchers are trying to understand disengagement from extremism by drawing on knowledge about disengagement and disaffiliation from criminal groups, or disengagement from marginal groups, the themes addressed by our respondents led us to take a step aside and instead mobilize the literature on mutual aid and self-help. Developed around peer support groups such as Alcoholics Anonymous (AA), this literature allows us to highlight elements of disengagement trajectories that have so far been little explored, that is to say social support components: emotional support, social integration, self-esteem support, tangible aid, informative support and opportunity for nurturance (Cutrona & Russel, 1990).
Although largely idiosyncratic, the results of this research show that exit trajectories from extremism are dotted with points of convergence. The importance of support from close ones (parents, spouses, friends), the value of experiential knowledge through the use of modelling and the opportunity to help others as a way of helping oneself, are some of the facilitating factors explored in this thesis.
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