La morphogenèse du nid chez les fourmis: une étude expérimentale et théorique chez la fourmi Lasius niger

La construction du nid chez les fourmis génère des structures assumant de nombreuses fonctions, qui sont en grande partie dépendantes de l’architecture produite. L’omniprésence de ces fonctionnalités contraste avec la forte diversité intra et inter-spécifique de la morphologie du nid.<p>Ce tra...

Full description

Bibliographic Details
Main Author: Toffin, Etienne
Other Authors: Deneubourg, Jean-Louis
Format: Doctoral Thesis
Language:fr
Published: Universite Libre de Bruxelles 2010
Subjects:
Online Access:http://hdl.handle.net/2013/ULB-DIPOT:oai:dipot.ulb.ac.be:2013/210056
Description
Summary:La construction du nid chez les fourmis génère des structures assumant de nombreuses fonctions, qui sont en grande partie dépendantes de l’architecture produite. L’omniprésence de ces fonctionnalités contraste avec la forte diversité intra et inter-spécifique de la morphologie du nid.<p>Ce travail a pour objectifs de déterminer d’une part la morphogenèse du nid durant son excavation par les fourmis (Chapitre 3), et d’autre part de quantifier l’impact de la taille du groupe (Chapitre 3) et de la qualité de l’environnement (qualité du matériau, gravité; Chapitres 4 & 5) sur cette séquence. Pour répondre à ces questions, nous avons utilisé un dispositif de creusement en deux dimensions (2D) afin de suivre la dynamique d’excavation et l’évolution de la morphologie du nid au cours du temps.<p>Nous avons tout d’abord mis en évidence (Chapitre 3) un changement brutal de la morphologie du nid au cours de sa croissance. Durant une première période d’excavation homogène, le nid est constitué d’une seule cavité de forme circulaire et au contour régulier. Par la suite, le pourtour de la cavité devient plus irrégulier, l’apparition de ‘‘bourgeons’’ lui donnant une apparence plus plissée. Enfin, la cavité centrale cesse de croître lorsque des ramifications se déploient depuis certains des ‘‘bourgeons’’. Nous avons qualifié de transitions morphologiques ces brusques changements de forme, dont la fréquence d’apparition augmente avec la taille de la population.<p>Notre analyse et le recours à la simulation semblent indiquer que ce phénomène soit basé non pas sur un changement de comportement des ouvrières excavatrices mais sur la densité d’activité au front de creusement. Lorsque celle-ci est importante, des phénomènes d’encombrement se manifestent et le nid est excavé de manière homogène. À l’inverse, lorsque l’encombrement diminue les ouvrières peuvent focaliser leur travail et excavent des galeries. Un modèle analytique (Chapitre 6) a permis d’étudier les conditions d’apparition de cette transition morphologique.<p>Nos autres résultats indiquent que le matériau de construction influence très fortement la morphogenèse du nid (Chapitre 4) :les nids excavés dans un milieu cohésif sont plus fréquemment ramifiés et la transition morphologique apparaît à des surfaces de nid plus petites que dans un milieu granulaire. Il semblerait qu’à nouveau, il n’y ait aucune variation comportementale impliquée, mais que l’environnement joue un rôle de ‘‘médiateur’’ des interactions entre les fourmis: le milieu change le temps d’extraction et donc la probabilité individuelle d’excavation, cette variation est exacerbée par les mécanismes d’amplification à l’œuvre, modifiant alors sensiblement la dynamique collective de creusement et la structure du nid.<p>Enfin, une série d’expériences (Chapitre 5) nous a permis de déterminer l’influence de la gravité sur la morphogenèse. Il apparait que la gravité sert de gabarit à la construction, puisque les nids excavés dans un dispositif à l’orientation verticale sont tous dirigés vers le bas. Aussi, si le nid prend directement une forme de long puit vertical sans jamais présenter de chambre, le mécanisme de transition morphologique reste visible, sous forme de bifurcation des galeries à leur extrémités. Ce phénomène de tip-splitting semble aussi apparaître sous la contrainte de la densité d’ouvrières excavant au fond des galeries.<p>Notre travail a donc mis en évidence un phénomène de transition morphologique capable de produire les modules de base de tout nid - chambres et galeries -, et qui semble découler non pas de modifications comportementales, mais de la seule interaction de l’amplification de l’activité et de l’encombrement au front d’excavation. Ce phénomène ubiquiste propose une explication à la grande variété de structures observées sur le terrain, en lien notamment avec la diversité et l’hétérogénéité des milieux, et la dynamique des colonies. Enfin, les similitudes de la transition morphologique avec les instabilités de croissance observées dans de nombreux systèmes biologiques et physico-chimique invitent à considérer ces derniers phénomènes à la lumière de nos résultats. === Doctorat en Sciences === info:eu-repo/semantics/nonPublished