Summary: | L’enseignement de l’histoire de l’Islam des Arabes tel qu’il est conçu dans les manuels scolaires d’histoire en France, entre 1948 et 2008, a-t-il pu constituer une image de l’Autre stéréotypée ? L’histoire véhiculée dans ces manuels présentent-ils une conception de l’altérité déformée et figée ? Cette recherche se base sur l’un des éléments les plus durables, constants et universels dans le système scolaire : le manuel scolaire. Véritable objet de représentation culturelle (Choppin, 1980), il est un outil multiple et ses responsabilités sont nombreuses. Résultat du difficile processus de transposition didactique, amenant l’objet culturel de référence à l’objet enseigné, il est source de savoirs, de connaissances et de représentations pour l’élève. Il est aussi le vecteur des compétences jugées nécessaires par la société et des valeurs de cohésion sociale et culturelle qu’elle veut pour ces futurs citoyens (programmes scolaires). Il est également le reflet de l’état des connaissances d’une époque et de la vision de son histoire. À partir de ces différentes demandes, des choix de contenus sont alors opérés, de manière autonome, par les auteurs de manuel scolaire. Outil influent donc, le livre scolaire est aussi support pour l’enseignant surtout lorsqu’il maîtrise peu le sujet. Bien qu’il soit complexe de connaître quelles utilisations les enseignants en font dans leur classe, ces derniers présentent à la lecture une vision de l’Autre (pas toujours étranger) parfois alter et parfois alien. La recherche sur les manuels scolaires est donc un terrain d’exploration idéal pour comprendre comment l’histoire de l’Islam et des Arabes est enseignée dans les manuels scolaires et ses conséquences sur la conception de l’Autre, à travers sa relation avec l’Un. À travers un corpus de deux-cent-vingt-deux manuels scolaires d’histoire, édités entre 1948 et 2008, quatre-vingts photos, plus d’une centaine d’extraits et une dizaine de cartes ont été sélectionnés.Inscrire l’analyse des manuels scolaires dans le champs de l’histoire culturelle permet de faire émerger la dimension sociale de ce sujet, c'est-à-dire « l'ensemble des représentations collectives propres à une société » (Ory, 1987). L’analyse culturelle des représentations de l’Islam et des Arabes s’inspire alors à la fois des études sur la constitution de l’altérité et sur les manuels scolaires. En liant « étroitement l’étude des textes, celle des objets matériels et des usages qu’ils engendrent dans la société » (Chartier, 1992), une combinaison d’analyses (quantitative et qualitative) ainsi que des critères de stéréotypie ont été établis pour examiner ces manuels et répondre à nos questionnements de départ. Les relations entre la France et l’Islam sont très anciennes, semées de controverses, de tourmentes, de passions et de partages. Elles sont le résultat d’expériences historiques propres à ce rapport si particulier et transmettent une mémoire forte, présentant à la fois des incompréhensions, réciproques, et des idéaux. Ce qui sépare a plus tendance à faire recette que ce qui rapproche mais se pourrait-il que ces incompréhensions proviennent de manuels scolaires enclin à produire une image stéréotypée de l’Autre afin de renforcer les croyances dans un conflit entre deux mondes ? De nombreuses études (Nasr, 2001 ; Mc Andrew & Oueslati, 2010 ; Costa-Lascoux & Choppin, 2011) et des rapports (Sellier, 2007 ; l’UNESCO, 2005 ; la HALDE, 2007) mettent en avant l’importance du rôle des manuels scolaires dans la reproduction des clichés, la persistance des stéréotypes et parfois du racisme sous des formes plus subtiles.Toutes ces dimensions entremêlées donnent à cette étude une vision originale et intéressante et apportent un regard différent sur la représentation de l’altérité. === The teaching of the history of Islam of the Arabs as it was conceived in history textbooks in France, between 1948 and 2008, could it constitute an image of the Other one stereotyped ? Does the story conveyed in these textbooks present a distorted and frozen conception of the otherness ? This research is based on one of the most enduring, consistent and universal elements in the school system : the textbook. True object of cultural representation (Choppin, 1980), it is a multiple tool and its responsibilities are numerous. Result of the difficult process of didactic transposition, bringing the cultural object of reference to the taught object, it is source of knowledges, understandings and representations for the pupil. It is also the vector of skills deemed necessary by society and values of social and cultural cohesion that it wants for these future citizens (school programs). It is also a reflection of the state of knowledge of an era and the vision of its history. From these various requests, content choices are then made, autonomously, by textbook authors. Influential tool thus, the textbook is also support for the teacher especially when he has little knowledge over the subject. Although it is complex to know which uses the teachers make it in their classrooms, the latter present to the reading a vision of the Other (not always foreigner) sometimes alter and sometimes alien. Textbook research is therefore an ideal field for exploring how the history of Islam and Arabs is taught in textbooks and its implications for the conception of the Other, through its relationship with the One. Through a corpus of two-hundred and twenty two history textbooks, published between 1948 and 2008, eighty photos, more than a hundred extracts and about ten maps were selected.To include the analysis of textbooks in the field of cultural history makes it possible to bring out the social dimension of this subject, that is to say "the set of collective representations specific to a society" (Ory, 1987). The cultural analysis of representations of Islam and Arabs is then inspired by both studies on the constitution of otherness and textbooks. By linking "closely the study of texts, that of material objects and the uses they engender in society" (Chartier, 1992), a combination of analyzes (quantitative and qualitative) as well as criteria of stereotypy have been established to review these manuals and answer our initial questions.Relations between France and Islam are very old, full of controversy, torment, passions and sharing. They are the result of historical experiences peculiar to this particular relationship and transmit a strong memory, presenting at the same time misunderstandings, reciprocal, and ideals. What separates is more likely to be successful than what brings people together, but could it be that these misunderstandings come from textbooks prone to producing a stereotypical image of the Other in order to reinforce beliefs in a conflict between two worlds?All these intertwined dimensions give this study an original and interesting vision and bring a different perspective on the representation of otherness.
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