Summary: | Ce travail a pour vocation d’interroger, dans un corpus de pièces françaises compris entre 1537 et 1583, la spécificité de la présence féminine en tragédie et son rôle dans l’élaboration de l’esthétique tragique, supposée entre autres à partir du constat de la préférence des premiers dramaturges pour les héroïnes. Nous examinons la place du féminin et ses enjeux à trois niveaux différents. Tout d’abord, nous étudions les textes théoriques et paratextes qui définissent la tragédie. Dans ce cadre, nous ne trouvons aucune association explicite du tragique et du féminin, néanmoins le féminin y est défini de manière problématique, entre nécessité de la norme (la convenance) et constat de la transgression (Electra qui émerveille par sa virilité). Ensuite, dans les textes eux-mêmes, nous observons une profusion de discours des personnages portant sur la question du féminin. Bien souvent, les lieux communs sont convoqués pour mieux marquer le décalage de l’héroïne avec les femmes du commun ; parfois, le cas de l’héroïne est même utilisé pour contester le lieu commun. Dès lors, nous étudions enfin l’action des femmes sur la scène tragique en la comparant à celle des hommes : l’étude de la spécificité des rôles féminins dans l’intrigue, du type de jeu et de spectacle qu’elles mettent en place, celle de leur effet moral et idéologique sur le spectateur enfin, nous permettent de redéfinir l’héroïsme féminin dans le corpus. Étant donné que la tragédie se construit, d’après nous, sur la recherche de l’action extraordinaire, les héroïnes, plus admirables justement parce qu’elles appartiennent au sexe faible, paraîtraient d’abord plus favorables à la renaissance de la tragédie à l’antique de langue française et lui conféreraient ainsi ses premiers traits. === From a study of a corpus of French plays written 1537-1583, this dissertation examines in detail the female presence in tragedy and its role in the development of the aesthetics of tragic drama. The place of the feminine and the issues arising from it are analyzed on three different levels. First, the theoretical and paratextual works that define tragedy were studied. In this corpus of work, no explicit association between the tragic and the feminine is found. However, the feminine is defined throughout in a problematic way, between the necessity to conform to the norm (the decorum) and the evidence of departures from this norm (Electra will amaze because of her virility). Secondly, within the plays themselves, there are many speeches made by the characters pertaining to the question of femininity. Frequently, the common norms are referenced in order to better differentiate between the heroine and ordinary women; on occasion, the case of the heroine herself is used to contest more strongly the common norms. Finally, the action of the women in the tragic dramas is compared to that of the men. This entails the study of the roles of females in the plot, of the style of acting and performance required of them, of their moral and ideological effect on the audience, all of which allows for a redefinition of female heroism in the corpus. Given that tragic drama is constructed, in this author’s view, from the quest for extraordinary action, these heroines, all the more admirable precisely because they belong to the weaker sex, would primarily appear to be highly favorable for the successful revival of French classical tragedy, thus conferring upon it its first characteristics.
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