Summary: | En 1647, dans ses Remarques sur la langue française, Vaugelas oppose « la richesse et la beauté » de la langue française aux « langues pauvres » où les équivoques « abondent ». Au XVIIe siècle en France, l’écriture familière est une pratique de la langue propre à l’espace particulier qui assume délibérément une pauvreté de langage et son équivocité. Quels enjeux les contemporains attachent-ils à ce qui est, non pas un style, mais, comme l’exprime Dominique Bouhours, un état « immature » de la langue ?Dans une première partie (chap. 1 et 2), nous nous attachons au principal modèle de l’écriture familière qui organise la discussion au XVIIe siècle : le sermo (cicéronien ou augustinien). Nous mettons alors au jour une fiction politique sous la théorisation de l’écriture familière : ce qui est en jeu dans le sermo, c’est le passage du langage des communautés primitives, langage considéré comme simple mesure affective des relations humaines à un langage différencié propre aux sociétés avancées et fondé sur la représentation et le partage du sens.Notre seconde partie (chap. 3-6) explore les bouleversements que l’autonomisation progressive de l’espace privé provoque dans la compréhension de l’écriture familière au XVIIe siècle. Aux yeux des contemporains, les usages familiers de la langue constituent à la fois une opportunité favorisant le sentiment du commun et une menace sur les ambitions civiles qui y sont attachées.Les traités sur la conversation essaient d’en limiter les dangers ; les textes libertins en exacerbent les pouvoirs de césure.Notre dernière partie (chap. 7) se consacre au théâtre de Molière. A la suite des réajustements apportés aux notions de style et de représentation par notre exploration de la théorisation classico-baroque de l’écriture familière, comment interpréter le langage comique moliéresque ?Quelles conséquences sur notre compréhension du ridicule ? === In Seventeenth-Century France, familiar writing was a language practice unique to the particular space that intentionally assumed a poverty of form and multiplicity of meanings. What issues did 17th century contemporaries see at stake in what is not a “style”, but as described by Dominique Bouhours, an “immature” state of language? In the first part (chapters 1 & 2), we will focus on the principal model of familiar writing that centers the discussion in the 17th century: the “sermo” (Ciceronian or Augustinian). Thus we will shed light on a political fiction under the theorization of familiar writing: what is at stake in the “Sermo” is the passage from a language attached to primitive communities and understood as simply an affective measure of human relations to a differentiated language,unique to societies and built on the representation and sharing of meaning.The second part (chapters 3-6) will explore the disruptions that progressive empowerment of the private space provokes in the understanding of familiar writing in the 17th century. In the eyes of those who lived in the 17th century, familiar usage of language constituted both anoccasion that preferred the feeling of community, as well as a threat to civil ambition to which it is attached. Treaties on conversation tried to limit its dangers. Libertine texts exacerbated the power of its disruptions.The last part (chapter 7) is devoted to the theatrical works of Molière. Following readjustments brought to notions of style and representation by our exploration of the classico-baroque familiar writings, how does one interpret Molière’s comic language? What are the consequences for our understanding of “le ridicule”?
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