Summary: | La comédie mêlée d’ariettes, genre d’opéra-comique apparu au milieu du XVIIIe siècle, fait l’objet d’un regain d’intérêt depuis les années 1990 de la part des artistes et des chercheurs. Elle naît dans des circonstances marquées par le renouvellement de la comédie, et par l’apparition de l’esthétique en tant que discipline philosophique. De ce fait, elle témoigne d’une prise de distance vis-à-vis de la poétique classique, et d’un déplacement des critères d’évaluation de l’oeuvre d’art : la critique se détourne en partie de l’objet pour considérer le sujet : l’oeuvre est désormais jugée du point de vue de l’effet qu’elle produit. Dans ce contexte de libération vis-à-vis des normes académiques, la très grande diversité des pièces qui composent le répertoire de la comédie mêlée d’ariettes est telle que leur parenté ne va pas forcément de soi. Leur point commun le plus évident est l’alternance de dialogues parlés et d’airs, qui crée une discontinuité formelle à laquelle il faut ajouter une discontinuité stylistique et générique. Pour toutes ces raisons, on lui refuse parfois la qualité de « genre ». Il s’avère en tout cas qu’elle se dérobe à toute tentative de poétique. Toutefois, l’analyse des effets produits sur le public par la comédie mêlée d’ariettes met en évidence l’unité du répertoire et la cohérence interne à chaque pièce. Il semble donc pertinent d’adopter une approche esthétique plus que poétique, c’est-à-dire d’élaborer une dramaturgie du genre, en privilégiant une logique impressive qui conduit à opérer des rapprochements avec la peinture et le roman. La progression dramatique non linéaire du genre apparaît alors comme la conséquence d’une esthétique polarisée autour de « tableaux », autrement appelés « situations ». Ceux-ci favorisent l’irruption de la sensibilité au sein du réel prosaïque, et l’émergence d’une voix poétique, au service de l’expression d’une nostalgie dont la poésie lyrique traditionnelle n’est plus à même de se faire l’écho. === The comédie mêlée d’ariettes is a type of opéra-comique which emerged in the middle of the 18th century in France. Since the 1990s, artists and academics have shown renewed interest for this genre which came into being in a context characterized by the renewal of comedy and the emergence of aesthetics as a philosophical discipline. As a consequence, the comédie mêlée d’ariettes illustrates a shift of focus away from classical poetics and a significant change in the criteria used to judge the value of a work of art: critics partly turned away from the object in order focus on the subject – from then on, what mattered in the assessment of a work of art was the effect it produced. As playwrights let go of academics standards, the comédie mêlée d’ariettes repertoire is very diverse and therefore the kinship between the various plays is not self-evident. Their most obvious common point is the alternation of spoken dialogues and aria – or tunes, which creates a formal discontinuity that is to be added to the stylistic and generic discontinuity. For all these reasons, the comédie mêlée d’ariettes has often been denied the name of a “genre”. In any case, it proves difficult to formalize it into a poetics. However, analyzing the impact the comédie mêlée d’ariettes made on the public highlights both the unity of the repertoire and the internal coherence of each play. Consequently, it seems relevant to adopt an aesthetical rather than a poetical approach, that is to say to elaborate a dramatic theory of the genre favouring an impressionist logic which leads to comparisons with painting and the novel. The non-linear dramatic progression of the genre therefore appears to be the consequence of an aesthetics polarized around “stage pictures” (tableaux) also called “situations” The latter encourage both the sudden emergence of sensitivity amid the trivial reality and the apparition of a poetical voice which expressed a nostalgia that traditional lyrical poetry could no more voice.
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