Retour en Allemagne. Stigmate et identité dans l'oeuvre d'écrivains juifs de langue allemande contemporains

Dans la seconde moitié des années 1980, le champ littéraire allemand est marqué par l’apparition d’une nouvelle génération d’écrivains qui se définissent comme juifs et sont perçus comme tels par le public. Il n’est toutefois pas certain que cette appartenance religieuse justifie de les appréhender...

Full description

Bibliographic Details
Main Author: Mariotte, Christian
Other Authors: Sorbonne Paris Cité
Language:fr
Published: 2015
Subjects:
Online Access:http://www.theses.fr/2015USPCA035
Description
Summary:Dans la seconde moitié des années 1980, le champ littéraire allemand est marqué par l’apparition d’une nouvelle génération d’écrivains qui se définissent comme juifs et sont perçus comme tels par le public. Il n’est toutefois pas certain que cette appartenance religieuse justifie de les appréhender de manière conjointe. On se souvient en effet des classifications de sinistre mémoire effectuées par les études littéraires allemandes avant 1945. Dès lors, il ne s’agit nullement de rattacher l’ensemble des écrivains juifs de langue allemande contemporains à la catégorie difficilement définissable et parfois dangereuse de la « littérature judéo-allemande ». De façon plus modeste, nous vérifions l’hypothèse que trois écrivains emblématiques de cette génération – Barbara Honigmann, Rafael Seligmann et Maxim Biller – élaborent une « littérature du stigmate » dont le point d’ancrage est l’expérience de la judéité dans le « pays des meurtriers ». Fondée sur une méthodologie croisant la sociologie d’Erving Goffman (1922-1982) et d’autres approches, la réflexion s’organise en trois étapes. Tout d’abord, nous montrons que par le biais de la fiction et, d’une autre manière, l’essai, les trois écrivains identifient des moments-clés où l'individu réalise le déficit identitaire lié à la condition stigmatisée des Juifs allemands après 1945. Dans un deuxième temps, nous analysons les réponses (politiques, religieuses, etc.) que leurs œuvres proposent à la question de savoir s’il est possible d’échapper au stigmate. Enfin, nous examinons la réflexion de Honigmann, Seligmann et Biller sur les possibilités qu’offrent leurs stratégies d’écriture, leur positionnement au sein du champ littéraire et leur rapport à la langue en vue de conquérir une identité non stigmatique. Ce faisant, nous espérons montrer que loin d’enfermer les œuvres dans des classifications trop sommaires, la sociologie goffmanienne constitue une voie d’accès privilégiée à ce qui constitue leur singularité. === In the second half of the 1980s, a new generation appeared in German literature; these writers have defined themselves and been perceived by readers as Jews. However, this common religious background may not in itself justify apprehending them together – as some infamous classifications made by German literary studies before 1945 should remind us.The idea, therefore, is not to put all contemporary Jewish German-writing authors in the ill-defined and sometimes dangerous category of “Judeo-German literature”, but rather, more modestly, to verify this hypothesis: three emblematic writers of this generation – Barbara Honigmann, Rafael Seligmann and Maxim Biller – have created a “literature of stigmas” anchored in the experience of being Jewish in the “country of the murderers.” Based on Erving Goffman’s (1922-1982) sociology, among other sources, the reasoning is organized in three steps. It first shows that, through fiction as well as non-fiction, all three writers have identified key moments when an individual becomes aware of the identity deficit that goes along with the stigma borne by post-1944 Jewish Germans. Then, it analyses the various answers – political, religious, etc. – found in their works to the question of knowing whether this stigma can be escaped. It eventually examines Honigmann’s, Seligmann’s and Biller’s reflections on the possibilities offered by writing strategies, their positioning in the literary field and their relationship to language so as to conquer a stigma-free identity. We thus hope to show that Goffmanian sociology, far from confining these works to simplistic classifications, offers privileged access to what makes them unique.