L'émergence de l'économie sociale et solidaire : une histoire de la société civile organisée en France et en Europe de 1968 à nos jours : groupements, discours et institutionnalisations

« L’économie sociale et solidaire n’existe pas ». La sentence du sociologue Matthieu Hély dénonce une forme de privatisation qui consiste à transférer la solidarité de l’État social vers les initiatives socio-économiques, compatible avec le nouvel esprit du capitalisme. Mais la formule prête à confu...

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Bibliographic Details
Main Author: Duverger, Timothée
Other Authors: Bordeaux 3
Language:fr
Published: 2015
Subjects:
Online Access:http://www.theses.fr/2015BOR30008
Description
Summary:« L’économie sociale et solidaire n’existe pas ». La sentence du sociologue Matthieu Hély dénonce une forme de privatisation qui consiste à transférer la solidarité de l’État social vers les initiatives socio-économiques, compatible avec le nouvel esprit du capitalisme. Mais la formule prête à confusion. En pointant un possible oxymore, il laisse penser que l’économie sociale et solidaire n’a pas d’existence ontologique. Or, c’est une réalité sociale, dont les racines plongent dans le XIXe siècle. Si elle connaît une éclipse à partir des années 1930, elle réapparaît en 1968 à la faveur d’une réarticulation des rapports entre l’État, le marché et la société civile. Elle se scinde en deux branches : l’économie sociale historique et l’économie sociale émergente, qui prend successivement la forme de l’économie alternative, de l’économie solidaire et de l’entrepreneuriat social. À l’approche statutaire de la première, fait pendant l’approche axiologique de la seconde. L’économie sociale et solidaire est une émergence. Ce n’est pas la simple addition des formes d’entreprises qui la composent (coopératives, mutuelles et associations, puis sociétés commerciales à finalité sociale). Au contraire, « le tout est plus que la somme des parties ». Une alchimie particulière a lieu : l’acte d’institution, qui revient à poser la question du politique. Le problème est celui de la création qui survient dans le passage d’une économie sociale et solidaire en soi à une économie sociale et solidaire pour soi. Il convient donc d’explorer ses trajectoires, en considérant que l’économie sociale et solidaire n’a pas seulement une histoire, mais qu’elle est une histoire, c’est-à-dire le produit de dynamiques de groupements, de discours et d’institutionnalisations. À partir de l’étude de ces trois axes, cette thèse invite à s’intéresser aux métamorphoses de la société civile organisée de l’économie sociale et solidaire, dans une perspective multiscalaire, à la fois française et européenne, scandées par trois évènements structurants : l’irruption sociale de Mai 68, la fin de la guerre froide de 1989 et la crise du capitalisme de 2008. === “There is no such thing as the Social and Solidarity Economy”. The sentence rendered by sociologist Matthieu Hély is targeted at a form of privatization, which consists in transferring the social solidarity of the State to socio-economic initiatives, which are more compatible with the new spirit of capitalism. And yet his words are misleading. By pointing at a possible contradiction in terms, he leads us to believe that the social and solidarity economy has no ontological existence, despite the fact it is a social reality that has its roots in the XIXth century. Although it was somehow eclipsed in the 1930s, it came back to the fore in 1968 with the reshuffling of the relationship between the State, the market, and civil society. It then split into to branches: the historical social economy, and the emerging social economy, which found an expression in the alternative economy, the solidarity economy, and finally in social entrepreneurship. The statutory approach of the first found a match in the axiological approach of the second. The social economy is a form of emergence. It is not simply the sum of the forms of initiatives it is composed of (cooperatives, mutual fund organizations, and trading companies with a social aim). Much to the contrary, in fact, “the whole is greater than the sum of its parts”. A particular chemistry takes place through the act ofinstitution, which consists in questioning its political dimension. The issue lies in the creation process that occurs in the transitional phase from a social economy in itself to a social economy for itself. This requires us to explore the different paths it took based on the assumption that the social and solidarity economy does not only have a history, but also is a history in the sense that it spawned from group dynamics, speeches, and institutionalizations. Based on the study of these three key processes, this thesis seeks to offer a new insight into the metamorphosis of the organized civil society of the social and solidarity economy on both French and European levels, articulated around three main events: the social irruption of May 1968, the end of the Cold War, and the 2008 crisis of capitalism.