Summary: | La mangrove est un écosystème majeur des zones intertidales des côtes tropicales. En Nouvelle-Calédonie, les mangroves sont des zones tampon entre les massifs ultrabasiques, plus ou moins exploités, et un lagon inscrit au patrimoine mondial de l'UNESCO. Le long de l’estran, cet écosystème se décompose principalement en trois zones de végétation qui se développent parallèlement au trait de côte, avec du front de mer vers les terres : Rhizophora spp., Avicennia marina, tannes. Ce gradient botanique dépend de la durée d'immersion des marées, qui impose des gradients de teneur en eau, de salinité de l'eau interstitielle, d’oxygénation, et de teneur en matière organique dans les sédiments. L'objectif de cette thèse était d'améliorer notre compréhension du cycle biogéochimique du fer et du nickel dans les sédiments de mangrove, et de déterminer le rôle des paramètres édaphiques sur la mobilité de ces éléments métalliques. Ce travail est plus spécifiquement focalisé sur l’évolution de la cristallochimie de Fe et Ni en liant avec les (bio)transformations minéralogiques. Les analyses de spectroscopie d’absorption à rayons X montrent clairement que les spéciations de Fe et Ni évoluent en fonction des gradients redox qui marquent d’une part, la zone intertidale, et d’autre part, la profondeur. La goethite et les phyllosilicates, hérités des bassins versants latériques, sont les principaux hôtes du Fe et Ni dans la partie supérieure des sédiments de mangrove. Ces espèces minérales sont intégralement préservés en profondeur des sédiments des tannes, qui sont pauvres en matière organique et bien oxygénés. En revanche, sous les Rhizophora et les Avicennia, la goethite disparait rapidement avec la profondeur . Dans ces horizons inférieures anoxiques riches en matière organique, la sulphato-réduction se développe, et la pyrite et les complexes organiques sont les principales phases porteuses du Ni. A la limite entre les couches oxiques et anoxiques, une intense ré-oxydation du Fe (II) aqueux et des sulfures de fer conduit à la formation de ferrihydrite, lépidocrocite, et probablement de goethite. La proportion relative des oxyhydroxydes de fer néoformés et mal cristallisés, est plus élevé dans la mangrove à Rhizophora. En outre l’incorporation du Ni dans la pyrite est également moins prononcée dans cette zone. Une telle évolution latérale de la spéciation du Ni peut être liée à la réoxydation fréquente des pyrites porteuses de Ni en lien avec le balayage quotidien de cette zone par les marées. Ce cycle tidal, qui touche plus particulièrement la zone à Rhizophora du fait de sa position basse dans l’estran, peut être une cause majeure des cycles de réduction et d’oxydation des phases porteuses de Fe, et pourrait affecter de manière significative les bilans de masse du fer et du nickel dans les mangroves. En effet, le Ni tend à être immobile dans les tannes, à s'accumuler sous Avicennia, et à être partiellement libéré sous Rhizophora. Finalement, le comportement du Fe et du Ni dans des sédiments de mangrove subissant une oxydation intense, en réponse à un isolement de la mer, a été étudié. Au niveau du front d’oxydation, des concentrations très élevées de Ni en solution ont été mesurées , tandis que les concentrations en Ni dans la phase solide étaient quatre fois plus faible que dans l'horizon pyritisé, et 2,5 fois plus faibles que dans le sédiment supérieur. Ces résultats suggèrent que l'oxydation des sédiments de mangrove est une cause de perte en Ni pour l’écosystème. Cette thèse a permis une meilleure connaissance des processus minéralogiques qui conduisent à la fixation ou la libération des élémentes traces métalliques par les mangroves, et est donc utile pour la gestion des mangroves qui sont situés en aval de bassins versants latéritiques. === Mangrove forests are the dominant intertidal ecosystem of tropical coastlines. In New Caledonia, mangroves act as a buffer zone between Ni open-cast mines and a lagoon registered as a UNESCO World Heritage site. Across the intertidal zone, mangroves are composed of three main stands; with from the seaward side to the landward side: Rhizophora spp., Avicennia marina, salt-flat. This botanical gradient relies on the duration of tidal immersion, which imposes sedimentary gradients of water content, salinity, oxygenation, and organic content.The objective of this PhD thesis was to improve our understanding of the biogeochemistry of iron and nickel in mangrove sediments and to characterize the role of edaphic parameters on trace metals dynamic. Particular emphasis was focused on the mineralogical (bio)transformation of Fe and Ni bearing phases and on crystal chemistry. Both XANES and EXAFS data showed that Fe and Ni speciation strongly followed the redox boundaries marking the intertidal and depth zonations. Fe(III)-bearing goethite and phyllosilicates, herited from lateritic outcrops, were the major Fe and Ni hosts in the upper mangrove sediments. These mineral species were fully preserved at depth in the dry and oxic salt flat area. By contrast, beneath the vegetated Rhizophora and Avicennia stands, goethite rapidly disappeared with depth. In these anoxic horizons, sulfate reduction occurred, and pyrite and organic complexes became the dominant Ni-species. At the limit between oxic and anoxic layers, intense re-oxidation of aqueous Fe(II) and Fe-sulfides led to the formation of ferrihydrite, lepidocrocite and likely goethite. The relative proportion of the newly formed poorly ordered iron-oxyhydroxides was found to be higher in the Rhizophora mangrove stand. Moreover Ni incorporation in pyrite was less developed beneath Rhizophora stand. Such lateral evolution of Ni speciation may be related to reoxidation of Ni-bearing pyrites in the Rhizophora stand, which is subjected to periodic alternation of reducing and oxidizing events due to daily tidal fluctuations. The latter may be a major cause for continuous Fe reduction-oxidation cycles in the vegetated mangrove stands, and could significantly affect iron and nickel mass balances in mangroves. Indeed, Ni was found to be immobile in the salt flat, to accumulate beneath Avicennia and to be partially leached beneath Rhizophora. Eventually, Fe and Ni behavior in mangrove sediments currently oxidizing in response to isolation from the sea, was studied. In the layer of the oxidation front, really high concentrations of dissolved Ni were measured, while Ni concentrations in the solid phase were 4 times lower than in the pyritized horizon, and 2.5 times lower than in the upper sediment. These results suggest that mangrove sediment oxidation was a cause of Ni loss. This PhD thesis allows a better assesment of the mineralogical processes that lead to the fixation or the release of trace metals by mangroves, and is thus useful for the management of mangroves that are situated downstream lateritic watershed.
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