Summary: | Cette thèse porte sur la crise ivoirienne dans ce qu’elle décline de pluralité étiologique, de complexité dimensionnelle mais également d’intérêt épistémologique et heuristique en raison des pistes analytiques qu’elle ouvre et permet. Elle enracine la crise dans le « sol des fondations » développementalistes et du diffusionnisme des modèles étatiques à l’épreuve de la donne endogène. L’Houphouëtisme, conception pragmatiste du pouvoir, structure en grande partie la trajectoire ivoirienne postcoloniale marquée par le double cycle de la stabilité et de l’implosion crisogène. La crise structurelle de l’État-nation ivoirien a un complexe étiologique pluriel (économique, social, foncier, migratoire, politique, biopolitique). La faillite du modèle agro-exportateur a servi de terreau fertile à la triple crise socio- économique, politique et militaire. La phénoménologie belligène puise, en réalité, dans des causes lointaines et structurelles. Manipulant l’autochtonie et la différence ethnique à des fins politiciennes, les entrepreneurs politiques ivoiriens semblent avoir choisi le pouvoir au détriment de la nation. L’ivoirité, en tant qu’idéologie d’exclusion, est, en réalité, un outil biopolitique au service de la préservation tant du pouvoir que de l’hégémonie politique. Elle symbolise autant la déhouphouëtisation que la rupture du consensus social. Autant l’ethnie n’est pas, selon nous, une momie autant l’ivoirité ne constitue point ici un disque dur étiologique. Plus profondes et structurelles, les causes de la crise ivoirienne s’enracinent tant dans la généalogie que dans la trajectoire de l’État-nation à la construction inachevée. Renversant le paradigme marxiste, nous donnons ici le primat au politique sur l’économique dans une réalité ivoirienne marquée par la double faiblesse du secteur privé et de la société civile, conférant à la sphère étatique et son immense manne une importance néopatrimoniale. La rébellion et le recours aux armes comme moyens concurrentiels dans la conquête du pouvoir et la partition consacrent la fracture de l’État-nation, aggravée par la crise post électorale de 2010/2011. La prégnance des enjeux politiques n’empêche point de recourir à l’interparadigmité ainsi qu’à la bénéfique connexion des sciences pour un éclairage politologique, et au-delà, une exploration de ce champ épistémique que constitue la Côte d’Ivoire « dans » et « avec » le Monde. === This thesis focuses on the Ivorian crisis in what it holds in terms of etiological dimensional complexity but also of epistemological and heuristic interest because of the analytical ideas it opens and allows. It roots the crisis in the "rockbottom" of developmentalist theories and the diffusionism of state models resistant to endogenous data. Houphouëtism, a pragmatist conception of power, structures most of the Ivorian postcolonial trajectory marked by the dual cycle of stability and crisogenic implosion. A structural crisis of the Ivorian nation-state with a manifold etiologic complex (economic, social, land use, migration, politics, biopolitics). The failure of an agricultural export model fed the threefold crisis: socio-economic, political and military. The phenomenology generating war goes back, in fact, to structural and remote causes. Manipulating indigenism (autochthonous) and ethnic differences for political ends, Ivorian political “entrepreneurs” seem to have opted for power at the expense of the nation. Ivoreanity, as an ideology of exclusion, is in reality a biopolitical tool at the service of retaining power as well as political dominance. It symbolizes the dehouphouëtization as well as the break up of social consensus. Neither is ethnicity, in our opinion, a mummy, nor is Ivoreanity here an etiological hard drive. Deeper and more structural, the causes of the Ivorian crisis are rooted as much in the genealogy as in the trajectory of the nation-state whose construction is still unfinished. Reversing the Marxist paradigm, here we give primacy to the political over the economic in an Ivorian reality marked by a double weakness of private sector and civil society, giving the state sphere and its immense manna a neo-patrimonial importance. Rebellion and the use of weapons as a means to compete in the conquest of power and partition emphasize the collapse of the nation-state, aggravated by post-election crisis of 2010/2011. The salience of political issues does not prevent resorting to interparadigmity and the beneficial connection of science to political science insights, and Beyond, an exploration of this epistemic field that is Côte d'Ivoire "in" and "with" the World.
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