Summary: | Il existe une continuité dans l’« idée » russe de l’Etat qu’une analogie dans la continuité des systèmes ne reflète pas. De la Russie impériale à la Russie soviétique, l’Etat (Gosudarstvo) n’est pas conçu comme une entité abstraite et autonome. A la dimension césariste du pouvoir correspond la non-émergence, et du concept et de la réalité d’un Etat. Jusqu’en 1917, la conception russe du pouvoir est conditionnée par le discours idéologique – religieux. Après 1917, sa principale caractéristique est d’être subordonnée à l’idéologie, en tant qu’expression de la volonté du Parti communiste. L’Etat soviétique s’impose donc comme un Etat « de fait » et non comme un Etat « de droit ». La prédominance du discours idéologique entrave, à la fois, la constitution d’une culture de l’Etat, qui reste une culture du pouvoir, et la formation d’une culture de l’antériorité et de la supériorité du droit sur l’Etat. Après la désintégration de l’Union soviétique, la référence à la démocratie libérale et à l’Etat de droit devient un outil de la création d’une nouvelle légitimité pour l’Etat postcommuniste. L’entrée de la Russie dans la modernité politique nécessite une rupture avec les postulats idéologiques du passé. Or, la déconstruction du socialisme est un processus beaucoup plus complexe que la construction de la démocratie. Bien qu’ayant subi, sur plusieurs siècles, plusieurs types de transitions – de l’absolutisme de droit divin au socialisme, puis au postcommunisme -, l’Etat russe a donc conservé certains caractères constants et typiques qui en font, encore aujourd’hui, un modèle hybride, en tension entre autoritarisme et démocratie. === There is a continuity as concerns the « idea » of the state that an analogy with the different systems does not reflect. From imperial to Soviet Russia, the state (Gosudarstvo) is not thought of as an abstract and autonomous entity. Until 1917, the Russian conception of power is conditioned by the religious ideological discourse. After 1917, her main feature is one of submission to ideology, in other words the expression of the will of the Communist Party. The Soviet state stands out by its « de facto » nature, rather than a « de jure » state. The supremacy of the ideological discourse hampers both the constitution of a new state culture, which remains focused on power, and the formation of the precedence and the superiority of law over the state. After the disintegration of the Soviet Union, reference to liberal democracy and the rule of law becomes a tool in creating renewed legitimacy for the postcommunist state. Russia’s entry into political modernity demands a rupture with the ideological postulates of the past. The dismantlement of socialism is a much more complex process than the construction of democracy. Despite having been subjected, over centuries, to many types of transition – absolutism founded on divine right to socialism, then postcommunism -, the Russian state has always preserved certain features (be they constant or specific) that make it, and still today, a hybrid model pulling towards both authoritarianism and democracy.
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