Summary: | En Argentine et à l’étranger, le tango inspire un engouement croissant depuis un peu plus de dix ans. Mais lorsqu’on fait référence au tango on omet souvent que l’on désigne en fait un ensemble complexe d’expressions artistiques populaires –musique, danse et paroles chantées– qui mettent en scène une identité argentine. Les identités sont en effet le résultat de constructions discursives –informées par les discours sociaux sur les rapports de classe, de race et de sexe- qui se manifestent et font l’objet d’une reformulation constante dans les objets culturels. L’objectif consiste à comprendre comment une identité est véhiculée dans le tango et à identifier les discours sociaux qui l’ont construite selon des modalités singulières en fonction des époques. Pour ce faire, nous travaillerons à partir du corpus des refrains et des strophes constitué par l’ethnologue Robert Lehmann-Nitsche dans son ouvrage Textos Eróticos del Río de la Plata, ainsi que à partir des paroles de tango publiées entre 1900 et 1935, période qui correspond à deux étapes fondamentales : la Guardia Vieja et la Guardia Nueva. L’étude de l’œuvre poétique du groupe Gotan Project et de l’œuvre picturale surréaliste du peintre argentin Juan Carlos Liberti compléteront notre corpus à partir des formes contemporaines.Dans le premier volet de l’étude, il s’agira d’analyser la définition institutionnelle du tango à partir de l’étude du discours des historiens cosignataires de la demande d’inscription du tango dans le répertoire des objets culturels faisant partie du patrimoine immatériel universel auprès de l’Unesco. Dans la deuxième partie, nous questionnerons les luttes symboliques au principe des périodisations à l’œuvre dans l’histoire du tango. Un retour sur les premiers tangos recueillis par Lehmann-Nitsche, dont les thématiques sont associées aux maisons closes, qualifiés de « préhistoriques », et de ce fait marginalisées par la critique, nous permettra de rétablir les origines populaires du tango. === In Argentina and abroad, tango has known an increasing popularity over the last ten years. However, we often overlook the fact that tango is a term referring to a complex structure of popular artistic expressions, i.e. music, dancing and lyrics, forming an Argentinean identity. Indeed, identities are constantly shaped by relationships influenced by social classes, races and gender. Those discursive constructions offer a constant re-interpretation of cultural objects. The aim of our analysis consists in comprehending how an identity is reflected in tango and how to identify the social discourses which have built the tango along different periods and according to particular modalities. To answer to those questions, we will refer to the corpus of choruses and strophes constituted by the ethnologist Robert Lehmann-Nitsche in his book Textos Eroticos del Rio de la Plata as well as tango lyrics published between 1900 and 1935. This period corresponds to two stages of the evolution of tango referred to by musicians as the Guardia Vieja and the Guardia Nueva. The study of the poetic work of the Gotan Project group and of the pictorial work of the Argentinean surrealist painter Juan Carlos Liberti will complete our corpus of cultural objects of the contemporary era. In the first part of the study, we analyze the institutional definition of tango based on the study of the discourse of historians who signed the request to UNESCO for the inclusion of tango among cultural objects belonging to the universal immaterial heritage. In this part, we will shed light on the stakes associated to the definition of tango and expose our current critique on the subject. In the second part, we will question the symbolic struggles which are at the root of the different chapters making up tango’s history. A look back on the first tangos gathered by Lehmann-Nitsche—whose themes are brothels, qualified as ‘prehistoric’ and as such, marginalized by critics—will allow us to re-establish the popular origins of tango
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