Summary: | Au début du vingtième siècle, après deux décennies sans réforme électorale, le mode de scrutin devient un sujet de controverse. Cette étude se propose d’examiner les conditions du choix de la représentation proportionnelle par les membres de la Chambre des députés française ainsi que par d’autres militants. Au-delà de la rééligibilité législative, c’est à travers le changement du mode de scrutin (introduction du scrutin de liste et de la représentation proportionnelle) que le problème de la réélection apparaît sous la Troisième République. Les professeurs de droit constitutionnel, tant à Paris qu’en province, délaissent cette expertise malgré quelques entreprises militantes éparses. Leurs étudiants formulent alors un savoir académique vite enserré par les contraintes récurrentes des jurys de thèse. Nous cherchons à examiner pourquoi et comment le parlement s’est emparé de cette question. Si les conservateurs et les socialistes sont les plus zélés partisans de la représentation proportionnelle, on ne peut en rester au fait que les partis défendent des systèmes qui les favorisent le plus. Notre étude insiste sur la stabilité socio-biographique du recrutement parlementaire plutôt que sur les variations de majorité et donc d’intérêts. Il faut expliquer pourquoi et comment ce fut le débat parlementaire lui-même qui a pu aboutir à une réforme électorale. Le système mixte de 1919, entre proportionnelle et principe majoritaire, exprime cette tendance des députés à l’ « auto-critique » qui dessine in fine un « auto-portrait ». Progressivement, les circulaires ministérielles adressées aux préfets confondent ces problèmes en un seul mouvement qui tente de codifier l’organisation des candidatures qui pourrait être au fondement du renouvellement souhaité. Ce travail préfectoral retire aux seuls entrepreneurs électoraux le monopole de l’anticipation des résultats et en ménage une co-production administrative. Dans la production préfectorale, de nouvelles cartes des circonscriptions uninominales ont eu tendance à perpétuer le traditionnel « scrutin d’arrondissement ». Ces tentatives de réforme électorale spatiale ont également introduit une nouvelle échelle dans le déroulement des campagnes électorales. Cet élargissement de la capacité électorale a été rendu possible par une nouvelle représentation : la circonscription administrative du département a eu tendance à devenir le critère principal de la mobilisation électorale que ce soit pour la loi électorale de 1919 ou celle de 1927. === Early twentieth century, after two decades of indifference to electoral reform, the electoral system has become a controversial question. This study explores the factors that should been taken into consideration when members of the French Chamber of Deputies and some other activists have tried to choose “proportional representation”. Beyond its political and legislative dimensions, the problem of re-election of representatives in the Third Republic was influenced by manipulation of electoral rules – in particular the introduction of proportional and list voting. In Paris and in Province, professors desert this part of doctrine in spite of some militant activities. Students had produced their thesis under constraint because the boards of examiners were always the same. We seek to explain how and why Parliament becomes leader in this electoral reform. Conservatives and Socialists advocated more strongly the proportional representation. The problem is often stated on the level in which every political party prefers the electoral system that favors it. This study will underline the biographical and social effect of membership stability instead of change in partisan control of the legislature. We seek to explain why a parliamentary debate may lead to a change in the established electoral system. The mixed system of 1919, between proportional representation and majority principle, expresses the deputies’ trends to self-criticism which is also self- representation. Increasingly, ministerial letters of instruction to Prefects tend to conflate these elements into a single effort to codify the pre-selection of candidates who could form the base of the desired political renewal. In this way, the monopoly of expertise relating to anticipating and predicting electoral outcomes once held political entrepreneurs was replaced by co-management of elections by them and the Prefects. First, new maps for single-seat districts have tended to perpetuate the traditionnal “scrutin d’arrondissement”. These attemps of spatial electoral reform have introduced a new scale in electoral campaign. This enlargement of electoral capability was made possible with a new representation : the administrative district of “département” has tended to become the main criterion in electoral mobilization whatever one of the two different electoral rules in 1919 and 1927.
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