Summary: | Entre le XIème et le XVIème siècle, la Mer des Indes fut le théâtre de nombreux mouvements populationnels aux fins essentiellement commerciales ou coloniales. Madagascar se trouve à la croisée des mondes asiatiques et africains. La côte sud-est malgache a vu l'arrivée de plusieurs migrations : la dernière, probablement vers la fin du XVème siècle, serait celle des Antemoro dont une partie d'entre eux se réclame d'une origine arabe et se rattache à La Mecque. L'éthnie des Antemoro a fait l'objet de nombreuses études anthropologiques et linguistiques. Néanmoins, le débat sur l'origine des migrants fait toujours l'objet d'hypothèses contradictoires. Leurs origines génétiques pourraient ainsi être l'Arabie, l'Afrique de l'Est, l'Inde ou encore l'Asie du Sud-Est à une époque où ces régions étaient déjà islamisées. Ce travail a consisté à étudier la diversité génétique d'une population Antemoro afin d'apporter des éléments de réponse à la question de leur origine biologique. Ce projet interdisciplinaire a pour objectif de mettre en relation l'anthropologie culturelle et sociale avec l'anthropologie biologique. Le polymorphisme du chromosome Y a été étudié afin de rechercher les origines des lignées paternelles par l'analyse de 17 marqueurs microsatellites ainsi que des mutations ponctuelles de l'ADN de la partie non recombinante du chromosome Y. De même, la variabilité génétique des lignées maternelles a été analysée par séquençage des régions hypervariables I et II de l'ADN mitochondrial, et par la définition de polymorphismes bialléliques dans sa région codante. Nous avons mis en évidence la présence de deux haplogroupes du chromosome Y chez certains groupes Antemoro, qui les différencient de la diversité habituellement rencontrée dans les populations malgaches. Bien que la majeure partie des Antemoro entre dans la diversité observée en Afrique sub-Saharienne et en Asie du Sud-Est, quelques haplotypes, des lignées paternelles, les lieraient au Moyen-Orient. Les lignées maternelles, quant à elles, ne les différencient pas de celles des autres populations malgaches. L'isolat génétique formé par certaines « pseudo-castes » Antemoro confirme bien l'isolat culturel. Ce travail apporte une nouvelle vision de la diversité génétique humaine à Madagascar. === Between the 11th and 16th century, the Indian Ocean was the scene of many population movements notably for commercial and colonial purposes. Madagascar is located at the crossroads of the Asian and African continents. Several migrations have occurred in this region; the last one during the late 15th century involved the Antemoro population who claimed an Arabian origin in Mecca. Many anthropological and linguistic studies have been carried out on this ethnic group, but the origin of these migrants remains contentious. It is uncertain whether their origins were in Arabia, East Africa, India or Southeast Asia, when these regions were Islamized. In this study we assessed the genetic diversity of an Antemoro population from villages between Manakara and Vohipeno, to determine their biological origin. The aim of our interdisciplinary study was to link cultural and social anthropology with biological anthropology. Y-chromosome polymorphisms were studied by analyzing 17 microsatellites markers and some SNPs in the non-recombining region of the Y-chromosome to determine the biological origins of the paternal lineages. In addition, genetic variability of maternal lineages was analyzed by sequencing hypervariables regions I and II, and by defining bi-allelic polymorphisms in the coding region of mitochondrial DNA. We found two Y-chromosome haplogroups in some Antemoro groups that differentiated them from the typical genetic variability found in other Malagasy populations. Although most of the Antemoro showed a genetic diversity similar to that observed in sub-Saharan Africa and Southeast Asia, few haplotypes associated to paternal lineages linked them to the Middle East. Maternal lineages did not differ from those found in other Malagasy populations. The genetic isolate formed by some Antemoro groups confirmed their cultural isolation. This study provides a new view of the human genetic diversity in Madagascar.
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