Summary: | La présente étude s’appuie sur la confrontation de six œuvres françaises, anglaises et italiennes des XIXe et XXe siècles pour amorcer une réflexion sur la mise en scène de l’échec dans la fiction romanesque. Elle montre en premier lieu que les représentations de l’échec sont façonnées à la fois par le cheminement individuel de leurs auteurs et par les tensions sociales et politiques agitant leurs époques (l’Angleterre au lendemain de la Révolution Française puis à l’apogée de l’Ère industrielle et de la société victorienne ; la Sicile au sortir du Risorgimento puis l’Italie mussolinienne ; la France de la Belle Époque ou de l’entre-deux-guerres).La deuxième partie de cette thèse entend mettre en évidence trois aspects essentiels de la poétique des « romans de l’échec ». Elle s’attache tout d’abord à la distribution du temps, qui oscille entre linéarité et cyclicité, évoquant l’image du flux et reflux marin. Elle s’intéresse ensuite à la profusion de personnages velléitaires, déchiffrant leur rapport au monde à travers le prisme de leurs illusions livresques, à l’instar des protagonistes de Flaubert ou Dostoïevski. Elle met en lumière, enfin, la singulière dynamique qui conduit personnages et objets de fiction à échanger leurs attributs et fonctions : tandis que les premiers se trouvent ravalés au rang d’objets inutiles ou délaissés, les seconds conquièrent une existence autonome.Cet essai se conclut par un questionnement sur la charge subversive des romans de l’échec. La forme romanesque se révèle en effet douée d’une exceptionnelle faculté de résistance aux discours idéologiques et à l’esprit de système, dont elle déjoue insidieusement les aspirations néfastes. === This study focuses upon a comparison of six works in French, English and Italian from the 19th and 20th centuries, in order to reflect upon the staging of failure in the novel form. Firstly, the study demonstrates how representations of failure are shaped both by the individual development of their authors, and by the social and political tensions of the period through which they lived (England after the French Revolution, and later at the height of the industrial revolution in the Victorian age; Sicily after the Risorgimento, and under Mussolini’s regime; France during the belle époque or the interwar years.)The second part of this thesis aims to highlight three principal aspects of the poetics of the ‘novel of failure’. This section focuses initially on the distribution of time – a temporality which oscillates between the linear and the cyclical, invoking the image of tidal ebbs and flows. Subsequently, the section emphasises the preponderance of weak-willed characters, who aim to decode their relationships to the world through the prism of their naïve and bookish illusions, in the manner of a Dostoyevskian or Flaubertian protagonist. Finally, this section seeks to illuminate the peculiar process that leads characters and objects of fiction to exchange their attributes and functions: while the former find themselves reduced to the level of useless or abandoned objects, the latter achieve an almost autonomous existence.The thesis concludes by engaging with the question of the subversive charge of the ‘novel of failure’. The novel form reveals itself to be endowed with an exceptional capacity for resistance to ideological discourses and mechanisms of socio-cultural control, whose detrimental aspirations it insidiously frustrates.
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