Summary: | Ce travail est centré sur l'analyse du nierika, un concept clé des Huichol (Wixaritari) de la Sierra Madre occidentale du Mexique. Ce terme désigne notamment une série d'objets et d'images. Plus connu comme le nom des célèbres « tableaux de fils » (esp. cuadros de estambre ; angl. yarn paintings), introduits sur le marché de l'art populaire mexicain à partir des années 1950, il a d'autres référents multiples qui vont du plus concret au plus abstrait. Il renvoie à la fois à différents objets rituels percés d'un trou au centre, à des figures iconographiques (peyotl, fleur, étoile…) et encore à certains lieux de culte considérés comme des passages entre les différents niveaux du cosmos huichol. Forme substantivée de la racine verbale « nieriya », qui signifie « voir », ce terme se réfère également à différentes expériences de perception visuelle dans cette société. L'hypothèse soutenue est que la prémisse du concept d'art chez les Huichol se fonde sur la vision et qu'ils pratiquent un « art de voir » qui, s'il est défini comme une expérience spécifique des chamanes pour « voir dans le monde des ancêtres », constitue également un idéal poursuivi par l'ensemble de la communauté, dont les artistes et artisans. L'étude du nierika en tant qu'« art de voir » permet de découvrir des points d'articulation entre les modalités de la vision et les processus de création huichol. Ainsi, ce concept fait partie d'un vaste système taxinomique, se déployant par concaténations. Outre le fait qu'il illustre cette multiplicité, le nierika constitue la synthèse du tout dont il fait partie, opération complexe que nous découvrirons tout au long de cette étude, à partir d'exemples concrets. === This study focuses on an analysis of nierika, which is a key-concept of the Huichol (Wixaritari) people of Western Mexico Sierra Madre. The term refers in particular to a series of objects and images. Better known as the famous « yarn paintings » which were introduced on the popular Mexican art market in the 1950's, it also refers to a wide range of other entities that go from the most concrete to the most abstract. It is used to designate various ritual objects with a whole in the middle, iconographic figures (peyotl, flower, star…) but also places of worship considered as gateways between the different levels of Huichol cosmology. The word, which is derived from the verb « nieriya », meaning « to see », also refers to various visual perception experiences of this society. This study argues that the premises of the concept of art in the Huichol culture is founded on vision, and that they practice an « art of seeing » which is both a specific chamanic experience intended for « seeing into the world of the ancestors » and an ideal pursued by the community as a whole, including artisans and artists. The study of nierika as an « art of seeing » uncovers how Huichol modes of vision and creative processes are linked and articulated. The concept is thus part of a vast taxonomic system which develops by concatenations. Not only does nierika illustrate this multiplicity ; it also makes up the synthesis of which it is a part — a complex operation which we will discover all through this study, by means of concrete examples.
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