Summary: | L'histoire de la Nouvelle-France, plus précisément celle des seigneuries laïques à l'époque du régime français, même si elle remonte à plus de 300 ans, reste méconnue. Cela vient probablement du fait que l'historiographie concernant le régime seigneurial est assez limitée. Ainsi, l'étude de la seigneurie de Beaumont de 1672, année où celle-ci fut concédée à Charles-Thomas Couillard, sieur des Islets, jusqu'à la fin du régime français, nous semble représentative de cette période. Nous ne pouvons faire l'étude d'une seigneurie sans parler de l'environnement dans lequel elle se situe. Dès le XVe siècle, les Européens entreprennent de nombreux voyages à travers tout l'Atlantique afin de découvrir un passage pour rejoindre les pays asiatiques. Comme l'Europe dépend de la Méditerranée, il devenait donc nécessaire, afin de réduire les coûts des produits asiatiques, d'atteindre directement les pays producteurs. Après de nombreux voyages, la France revendiquera les terres allant de la Floride au Cap-Breton : la Nouvelle-France. Pendant longtemps, les autorités françaises essayent, sans succès, de coloniser la Nouvelle-France. C'est finalement au XVIIe siècle que la métropole française y instaure le régime seigneurial, constituant le fondement sur lequel s'organise toute la société rurale. Ce régime est en fait un système qui accorde des portions de terres à des seigneurs afin que ceux-ci y établissent des habitants, soumis à des droits et à des devoirs réciproques sous la surveillance de l'État. Ce régime seigneurial restera en place, malgré la Conquête de la Nouvelle-France par les Anglais en 1760, jusqu'en 1854, année où il sera aboli par une loi du Canada-Uni.
L'histoire de la région de la Côte-du-Sud, où se situe la seigneurie de Beaumont, remonte aux débuts de la colonisation de la vallée du Saint-Laurent. Ainsi, dès le XVIIe siècle, quelques immigrants de la France et d'autres censitaires issus des environs, décident de s'y établir. Deux principaux traits dominent le paysage sudcôtois : les montagnes et la plaine du Saint-Laurent. Bien entendu, c'est le fleuve Saint-Laurent qui est le plus important cours d'eau de cette région. Or, c'est à cette époque que Charles-Thomas Couillard, fils de Guillaume Couillard et de Guillemette Hébert (fille de Louis Hébert), se fit concéder par l'intendant Talon, la seigneurie de Beaumont. Tout au long de sa vie, le premier seigneur de Beaumont se consacra au développement de sa seigneurie. En outre, il y construisit son manoir ainsi qu'un moulin à farine et un moulin à scie. Dès 1681, la seigneurie de Beaumont compte 53 personnes; 15 maisons y ont été construites et 66 arpents de terre ont été mis en valeur. Le premier seigneur de Beaumont mourut en 1715. Il avait concédé pas moins de 42 censives. C'est l'un de ses fils, Charles-Marie, qui devint le deuxième seigneur de Beaumont. Cependant, deux ans avant la mort de son père, Charles-Marie s'était fait concéder l'espace se trouvant à l'arrière de la seigneurie de Beaumont. En 1723, il rendit foi et hommage au château Saint-Louis de Québec devant l'intendant Bégon et il lui remit son aveu et dénombrement qui nous permirent de constater une augmentation significative du nombre de censitaires, depuis 1681. Ainsi, tout comme son père avant lui, Charles-Marie se consacra au développement de sa seigneurie, tout au long de sa vie. Il concéda pas moins de 48 censives. À sa mort, c'est son fils, Charles-Marie, qui devint le troisième seigneur de Beaumont. Cependant, comme il était mineur, c'est sa mère qui administra la seigneurie pendant quelques années. Ainsi, la gestion de la seigneurie de Beaumont par les seigneurs Couillard s'étendit sur un siècle et demi.
Or, nous ne pouvons retracer l'histoire de la seigneurie de Beaumont sans parler de ceux qui l'ont humanisée, c'est-à-dire les censitaires. Tout au long du régime seigneurial, les censitaires qui prenaient possession de leur concession devaient d'abord abattre des arbres, défricher, construire leur maison et les dépendances et enfin, mettre en culture leur terre. Ceux de Beaumont ont colonisé le premier rang, le troisième rang et une partie du deuxième rang. Or, comment une famille, en particulier, procède-t-elle au fil des générations pour humaniser l'environnement ? C'est ce que nous avons voulu savoir en retenant une famille pionnière, qui fut étroitement liée avec la famille seigneuriale, soit celle de Zacharie Turgeon et de ses descendants. Zacharie Turgeon passa son enfance sur la seigneurie de Beauport. En 1694, il vint s'installer sur la seigneurie de Beaumont. Tout au long de sa vie, il cultiva sa terre et prit soin de bien établir ses enfants. Entre autres, il acheta une terre et la revendit plus tard à l'un de ses fils. Il se porta également garant de deux autres de ses fils pour l'achat d'une autre terre. C'est ainsi que la plupart de ses enfants demeurèrent sur la seigneurie de Beaumont. Or, Louis, fils d'un modeste censitaire et l'un des petits-fils de Zacharie Turgeon, épousa la fille du deuxième seigneur de Beaumont. Par la suite, il devint marchand et c'est l'un de ses fils qui devint le quatrième seigneur de Beaumont en plus d'occuper une fonction de notaire.
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