Le capitalisme marchand au Saguenay-Lac-Saint-Jean : John Guay (1828-1880), négociant et propriétaire foncier

Le capitalisme marchand requiert des qualités particulières de la part de ses principaux acteurs que sont les gens d'affaires. On ne s'improvise pas marchand, on le devient. Les phénomènes de génération spontanée sont rares, voire exceptionnels, en ce milieu où la concurrence est toujours...

Full description

Bibliographic Details
Main Author: Lapointe, Normande
Format: Others
Language:fr
Published: 1996
Subjects:
Online Access:http://constellation.uqac.ca/1144/1/1529112.pdf
Description
Summary:Le capitalisme marchand requiert des qualités particulières de la part de ses principaux acteurs que sont les gens d'affaires. On ne s'improvise pas marchand, on le devient. Les phénomènes de génération spontanée sont rares, voire exceptionnels, en ce milieu où la concurrence est toujours vive. C'est ainsi qu'on verra poindre, puis évoluer lentement, le cas de John Guay (1828-1880) qui nous semble représentatif du capitalisme canadien-français, au XIXe siècle. Cet homme, issu de La Malbaie, d'une famille de pionniers et de défricheurs, dont le père fut marchand et entrepreneur forestier, a suivi le mouvement de peuplement, depuis Charlevoix jusqu'au Saguenay, pour s'installer à Chicoutimi dès 1848 et y ouvrir un magasin. Il était alors commis de Joseph Collard, un marchand de son village natal. La carrière de John Guay débute véritablement en 1850, aux lendemains de son mariage. Elle se déroulera en deux phases: une première, d'une durée de dix-huit ans (jusqu'en 1868) se déroulera en association avec Joseph Collard et Alexis Dumas, autre marchand en ascension de La Malbaie. John Guay développera des activités commerciales, fera des investissements fonciers et s'intéressera à l'industrie forestière. L'aire géographique de ses activités comprendra le Saguenay et le Lac-Saint-Jean. La deuxième phase de sa carrière durera douze ans, soit de 1868 jusqu'à son décès en 1880. Il la réalisera à titre de marchand indépendant, donc seul responsable de son succès ou d'un échec, toujours possible. Or c'est là qu'apparaît, plus qu'auparavant, les qualités exceptionnelles dont était imbu un tel homme. Non pas qu'il varie ses activités, mais il les développe à un niveau sans précédent, peut-être rarement atteint par des Canadiens français. Voilà qui donne la mesure, la portée également des actions d'un tel homme sur son environnement. Disons-le, la vie quotidienne de centaines de familles, depuis Grande-Baie jusqu'à Roberval, dépendait de lui, c'est-à-dire du crédit qu'il pouvait offrir à son magasin, du travail à son commerce, sur ses nombreuses terres, et à ses moulins à scie. On croit que seuls les Price, à Chicoutimi, le surpassaient; or ceux-là étaient des capitalistes anglosaxons aux assises combien différentes des Canadiens français. Aux lendemains de son décès, sa veuve Marie-Emilie Tremblay, qui l'avait quotidiennement soutenu, continuera son oeuvre pendant dix ans, avec vigueur et intelligence, puis passera le flambeau à ses fils dont certains s'illustreront, notamment, dans le développement du capitalisme industriel. Qu'il suffise, à cet égard, de songer à la pulperie de Chicoutimi, établie en 1896, à même les capitaux (à ses débuts) de la famille Guay. Donc, trois générations de gens d'affaires: à La Malbaie, François; à Chicoutimi; John et ses fils, de 1850 à 1930. Les Guay auront donc marqué, d'une part, le développement économique de Charlevoix, de l'autre, l'évolution de la région saguenayenne et jeannoise. Ils furent, à leur mesure, des agents de développement économique, bref, de véritables capitalistes. Des hommes, de cette trempe, se retrouvent en chaque région du monde occidental, depuis le XVIe siècle. Ils ont été les principaux acteurs du capitalisme marchand.