Les représentations sociales de la dépression et de ses enjeux : comparaisons d'intervenants et de patients et relations avec l'état dépressif

Cette thèse a pour sujet les représentations sociales de la dépression. Bien que la dépression apparaisse un phénomène d'une importance préoccupante pour la société, au Canada comme ailleurs dans le monde, elle semble encore difficile à définir clairement. Les patients dépressifs et les profess...

Full description

Bibliographic Details
Main Author: Tremblay, Philippe
Format: Others
Published: 2012
Subjects:
Online Access:http://www.archipel.uqam.ca/4811/1/D2334.pdf
Description
Summary:Cette thèse a pour sujet les représentations sociales de la dépression. Bien que la dépression apparaisse un phénomène d'une importance préoccupante pour la société, au Canada comme ailleurs dans le monde, elle semble encore difficile à définir clairement. Les patients dépressifs et les professionnels de la santé, pour qui la collaboration reste déterminante dans le travail sur la dépression, peuvent en particulier aborder cette condition dans des perspectives différentes et rencontrer alors certaines difficultés à établir une compréhension mutuelle à son sujet. Peu de travaux semblent avoir été réalisés pour mettre à jour ce type de représentations. Les études menées sur les attitudes et croyances à l'égard de la dépression apportent des indications intéressantes, mais elles ont rarement inclus des patients dépressifs ou des professionnels de la santé mentale. De plus, ces études comportent aussi des limites rendant difficile l'intégration des résultats dans l'univers des relations de groupes, à l'origine de la construction des représentations sociales. Les deux études qui composent cette thèse s'inscrivent dans la perspective théorique et analytique des représentations sociales. Il s'agit d'une perspective intégrative permettant de cerner et d'organiser les prises de position des individus et des groupes et d'identifier leurs sources de variation. Le but principal de la thèse était de cerner et de comparer les représentations entretenues au sujet de différentes dimensions susceptibles d'avoir des conséquences sur le traitement de cette condition. Les participants à cette recherche sont 43 patients dépressifs, 92 professionnels de la santé mentale (omnipraticiens, psychiatres, psychologues) et 350 étudiants universitaires provenant de la région de Montréal, au Québec. L'objectif de la première étude était de cerner les représentations des causes et des interventions relatives à la dépression. À l'aide d'un questionnaire proposant une diversité de causes et d'interventions possibles, les participants ont eu à en évaluer l'importance et l'utilité, respectivement. Les réponses ont été traitées notamment par des analyses en composantes principales et des analyses de variance (ANOVA) afin de dégager les principes organisateurs des prises de position (Clémence, Doise & Lorenzi-Cioldi, 1994) et d'évaluer les distinctions dans les positionnements de groupe en fonction de leurs ancrages psychosociologiques (appartenance de groupe, âge et sexe). Un second objectif a consisté à identifier chez les patients dépressifs les liens possibles entre leurs représentations et leur état dépressif. Les résultats obtenus indiquent que des causes et des interventions sont reconnues importantes par l'ensemble des trois groupes (patients, professionnels et étudiants) alors que d'autres donnent lieu à des distinctions en fonction de la nature et du degré d'implication de chaque groupe face à la dépression (Flament & Rouquette, 2003; Rouquette, 1997). Globalement, les patients constituent le groupe qui accorde le plus d'importance et d'utilité à la plupart des causes et des interventions, alors que les étudiants sont ceux qui en accordent le moins. Les zones de consensus et de distinctions au sein des représentations exprimées par les patients et les professionnels constituent des pistes à considérer pour améliorer les interventions sur la dépression et l'établissement de l'alliance thérapeutique. Au sujet des liens entre les représentations et l'état dépressif, les relations observées indiquent qu'un état dépressif plus sévère s'accompagne d'une reconnaissance plus grande de certaines dimensions de causes et d'interventions, ce qui est aussi cohérent avec la théorie de l'implication. S'inscrivant en continuité avec la première étude, l'objectif de la deuxième étude était d'examiner les représentations de trois enjeux sociaux entourant le traitement de la dépression : 1-la hausse des consultations relatives à la dépression, 2-la hausse des prescriptions d'antidépresseurs et 3-les difficultés d'observance aux antidépresseurs. Bien que plusieurs hypothèses soient avancées dans la littérature scientifique pour rendre compte de ces phénomènes, il est difficile de déterminer quelles en sont les véritables raisons. Selon la perspective des représentations sociales, c'est notamment à travers les enjeux sociaux que les groupes construisent leurs représentations du monde et se positionnent les uns par rapport aux autres. Les participants avaient à évaluer à partir d'un questionnaire à quel point chacune des raisons proposées permettait d'expliquer les enjeux en question. Les résultats indiquent que des raisons sont considérées importantes de façon consensuelle à travers les groupes alors que d'autres dimensions laissent place à des positionnements plus distinctifs, en fonction notamment de l'identité sociale des groupes (Moliner, 2001 ; Mugny & Carugati, 1985). Ensemble, les deux études de cette thèse sont complémentaires et constituent un apport aux connaissances sur les représentations de la dépression. Globalement, les représentations mises à jour dans ces études témoignent de consensus et de distinctions dans les positionnements de groupe face à la dépression et soutiennent l'intérêt d'étudier cette problématique, de même que les enjeux de son traitement, selon la perspective des représentations sociales. Les résultats sont globalement cohérents avec l'orientation des principes organisateurs de prises de position (Clémence, Doise & Lorenzi-Cioldi, 1994), la théorie de l'implication (Flament & Rouquette, 2003; Rouquette, 1997) et la fonction identitaire (Mo liner, 2001 ; Mugny & Carugati, 1985) des représentations sociales. Par la mise à jour de ces différents points de vue, les résultats indiquent aussi des pistes pour bâtir des interventions plus intégrées au sujet de la dépression et valoriser l'écoute et le partage au sein de l'échange intersubjectif entre le patient et le professionnel. ______________________________________________________________________________ MOTS-CLÉS DE L’AUTEUR : représentations sociales, dépression, patients, professionnels de la santé mentale, implication, fonction identitaire