Summary: | Le roman libertin, au XVIIIe siècle, est litigieux. La censure, l'édition clandestine et la fascination du public marquent l'histoire littéraire du genre et nombre d'auteurs qui excellent dans des formes d'écriture dites sérieuses comptent dans leur production un ou plusieurs romans libertins, Se mouvant entre les frontières des romans érotiques et philosophiques, le roman libertin se présente comme un lieu fondamental de diffusion de la pensée des Lumières, Ces romans qui dénoncent les lacunes de l'ordre établi se veulent donc des témoins inestimables des moeurs de Ieur temps. Ils ont partie liée avec l'émergence d'un discours moral où l'étude du comportement et la recherche d'un bonheur indépendant de la religion demeurent au centre des préoccupations, Les Mémoires pour servir à l'histoire des moeurs du XVIIIe siècle de Charles Pinot Duclos sont à cet égard fort révélateurs, Ils mettent en scène un enchevêtrement des discours moraux et libertins à partir duquel surgit la pensée duclosienne développée précédemment par l'auteur dans un traité de morale intitulé Considérations sur les moeurs de ce siècle.
Notre premier chapitre retracera en quoi les Mémoires de Duclos se situent au carrefour du libertinage et de la morale. Il s'agira d'examiner la place occupée par ce roman au sein de l'ensemble des romans libertins du XVIIIe siècle dans le but de faire ressortir ses caractéristiques spécifiques. Nous verrons comment, à partir d'un discours critique sur le libertinage mondain, Ie roman s'oriente vers la diffusion de la morale duclosienne. Parce que la fragmentation générique permet ce mouvement, nous nous pencherons également sur Ies genres et sous-genres présents dans les Mémoires, soit le roman-mémoire, le traité de morale, le roman de formation et le roman-liste. À partir de cette exploration, nous aborderons spécifiquement le discours sur le libertinage tenu par Duclos qui s'articule spécialement dans la première partie du roman, La question de la fatuité, à partir de laquelle s'élabore le récit, inscrit le personnage dans une société dominée par le paraître qui incite l'adoption des caractères à la mode, dont celui du fat, au détriment de la spécificité de l'individu. L'étude de la notion de caractère suivra donc celle de la fatuité où nous verrons que Duclos, au contraire des caractères théophrastiens, met en scène la progression d'un caractère, celui du narrateur, qui se met en oeuvre grâce à une suite d'expériences. Le bonheur, objet de notre dernier chapitre, s'avère un élément fondamental de la morale et constitue la visée du narrateur tout au long de la seconde partie du roman. Nous observerons les grands enjeux du XVIIIe siècle sur la question du bonheur qui se retrouvent dans les Mémoires, Duclos envisage le bonheur selon un équilibre entre les devoirs et les plaisirs, ce qui résume un idéal du bonheur où individualité et collectivité sont d'égale considération. ______________________________________________________________________________ MOTS-CLÉS DE L’AUTEUR : Libertinage, Morale, Moeurs, Fatuité, Caractère, Bonheur.
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