Summary: | Ce travail a été effectué dans le but paléoenvironnemental de dresser un cadre géochronologique aux alternances des phases arides et humides au Sahara Occidental et aux Iles Canaries Orientales. Il s'intégrait dans une étude multidisciplinaire sur les changements globaux (EPGC, Earth Processes in Global Change) menée dans le cadre du projet CLIP (Climate of the Past) sous l'égide de l'UNESCO (United Nations Educational, Scientific and Cultural Organization) et de l'IUGS (International Union of Geological Sciences).
La datation par luminescence stimulée optiquement a été appliquée aux feldspaths et aux quartz (quand ce fut possible) d'échantillons représentant les phases humides de trois coupes: Tah au Sahara Occidental, la Rosa Negra à Fuerteventura et Mala à Lanzarote. Une correction du fading a été appliquée aux feldspaths. Différentes méthodes inhérentes à FOSL (additive, régénération, Australian slide method, SAR, SAAD et grains individuels) ont été utilisées afin de comparer les résultats pour pouvoir valider les âges obtenus en toute confiance, vu l'absence totale de contrôle chronologique.
Au Sahara Occidental, au niveau de la coupe Tah, les différentes méthodes appliquées aux feldspaths aboutissent aux mêmes âges après correction pour le fading et ce, pour tous les échantillons. Ces âges correspondent également à ceux obtenus sur les quartzs des échantillons non saturés. On peut ainsi affirmer que la coupe Tah couvre les 110 derniers milliers d'années avec une phase humide prononcée à 105 ± 9, 109 ± 11 ka, puis 3 autres autour de 50 ± 5, 31 ± 3 puis 13 ±1 ka, la dernière étant datée par 14C.
Aux îles Canaries Orientales, des difficultés d'ordre minéralogique, dues aux très fortes teneurs en carbonates et aux faibles quantité de quartz et de feldspaths, ont restreint l'application des différentes techniques. Les minéraux présents montrent des changements de sensibilité marqués, probablement à cause de leur origine volcanique récente. Seule la méthode SAR, qui a l'avantage de s'appliquer à des aliquotes uniques en corrigeant les changements de sensibilité, aboutit à des résultats fiables. Les quartzs n'ont pu être datés car ils sont saturés dans les niveaux les plus anciens et absents dans les niveaux sommitaux. Une fois la correction pour le fading appliquée, la coupe de la Rosa Negra à Fuerteventura montre l'existence de phases humides autour de 253 ±27, 190 ± 30 et 147 ± 25 ka. Au niveau de la coupe Mala à Lanzarote, les échantillons de base n'ont malheureusement pu être datés car les aliquotes émettent très peu en OSL ou sont très peu reproductibles. Cependant, deux phases humides sommitales autour de 191 ± 55 et de 130 ± 11 ka se corrèlent avec les niveaux sommitaux de la coupe de la Rosa Negra ce qui suggère que les lacunes observées à la Rosa Negra ont une signification régionale.
La séquence, composée de la superposition des coupes la Rosa Negra et Mala, apparemment contemporaines, et de la coupe Tah, témoigne des variations climatiques au Sahara depuis 250 000 ans. Les différentes phases humides qui y sont représentées coïncident avec les limites des périodes interglaciaires ou interstadiaires déterminées par les variations des isotopes stables (ô18O) de carottes marines du Bassin Canarien, similaires à celles de la courbe SPECMAP. D'autre part, ces phases humides correspondent à celles enregistrées dans les travertins ou sous forme de hauts niveaux lacustres épars dans le reste du Sahara et au Sahel. A l'exception de l'épisode humide autour de 80 ka, correspondant au stade isotopique 5a dans le domaine marin, probablement érodé par la déflation éolienne, cette séquence est l'unique séquence continentale pratiquement continue couvrant plusieurs cycles climatiques dans l'environnement aride saharien.
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