La gestion française des rivières et ses indicateurs à l'épreuve de la directive cadre
La directive 2000/60/CE établit un nouveau cadre pour une politique communautaire dans le domaine de l'eau. Elle fixe des objectifs de bon état écologique des milieux aquatiques. Elle impose une optimisation et une planification des actions de restauration avec des échéances précises. Pour les...
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Language: | FRE |
Published: |
AgroParisTech
2007
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Subjects: | |
Online Access: | http://tel.archives-ouvertes.fr/tel-00161257 http://tel.archives-ouvertes.fr/docs/00/16/12/57/PDF/these_G_Bouleau_definitive.pdf http://tel.archives-ouvertes.fr/docs/00/16/12/57/ANNEX/soutenance_these_5.pdf |
Summary: | La directive 2000/60/CE établit un nouveau cadre pour une politique communautaire dans le domaine de l'eau. Elle fixe des objectifs de bon état écologique des milieux aquatiques. Elle impose une optimisation et une planification des actions de restauration avec des échéances précises. Pour les institutions françaises de gestion de l'eau, dont les agences, il s'agit de passer d'une obligation de moyens consacrés à des équipements à une obligation de résultats mesurés par des indicateurs biologiques peu utilisés pour la décision aujourd'hui. <br />Ces indicateurs sont de curieuses constructions à cheval entre l'ingénierie et la biologie et la littérature abonde d'éléments opposant ces deux mondes. D'un côté les ingénieurs de la filière « eau » dimensionnent et gèrent des ouvrages grâce à des indicateurs. Ils ont pour héritage un passé de conquête et réalisent des projets efficaces pensés hors du temps. De l'autre, les pêcheurs et les biologistes ont le souci de la vie au quotidien avec une observation méticuleuse et domestique. Ils ont de la curiosité pour des êtres vivants ignorés des normes et certains d'entre eux ont fait de l'écologie une revendication politique bien ancrée dans les préoccupations du jour. Au-delà des différences de culture, l'opposition entre la filière eau et les amateurs de milieux aquatiques est aussi un rapport de moyens. La filière « eau » bénéficie d'un budget propre de près de 20 milliards d'euros par an. La gestion du patrimoine piscicole a bénéficié dans ses meilleures années d'un budget de 10 millions d'euros, mais elle disparaît aujourd'hui pour se fondre dans le régime commun des agences de l'eau. <br />On ne peut cependant pas rester sur ce constat d'opposition entre ingénieurs et biologistes pour comprendre les indicateurs biologiques. Le pouvoir critique de la biologie qui met en lumière des êtres « anormaux » a régulièrement induit des réactions des filières de gestion qui ont établi de « nouvelles normalités » à ces êtres dérangeants. Pour étudier ce passage de relais, j'étudie les organisations de gestion de l'eau et leurs outils comme des institutions au sens d'Anthony Giddens (Giddens 1987), c'est à dire des combinaisons entre un référentiel de sens, des règles de droit et des moyens. Ce niveau structurel auquel les acteurs se sont habitués continue d'évoluer sous l'influence de médiateurs mobilisant de nouveaux réseaux (Latour 1989). J'étudie ainsi comment sont mises en mots, en nombres, en variables et en modèle (Desrosières 2003) des spécificités auxquelles des naturalistes sont attachés. J'étudie également le lien entre ces modèles et la légitimité politique de l'action publique (Foucault 1978-79).<br />Je retrace ainsi la trajectoire conjointe de quelques outils de représentation des rivières sur le Rhône, sur la Seine et sur l'ensemble du territoire et l'histoire de la mise en place des institutions de la pêche, des agences, des différentes lois sur la nature, la pêche et l'eau. Cette épopée me permet d'identifier des stratégies et contextes communs aux différents promoteurs et assembleurs d'indicateurs biologiques.<br />Je m'intéresse alors aux pratiques de gestion de deux agences de l'eau pour comprendre leur faible utilisation des indicateurs biologiques. Je montre l'existence de plusieurs référentiels de gestion dans ces organismes. Je montre aussi le grand degré d'indétermination des dossiers avant leur stabilisation lors de l'attribution de subvention. Les stratégies d'assemblage inventées par les gestionnaires ont des similarités avec celles mises en œuvre par les biologistes pour parler au nom des rivières. Elles permettent l'adaptation et l'apprentissage.<br />Me déplaçant alors au niveau européen, je relate comment la directive cadre a été adoptée. Ce récit me permet de qualifier le contexte politique qui accompagne les nouvelles modalités d'évaluation. Je conclus alors sur l'enjeu des évaluations partisanes dans une perspective pluraliste pour déconstruire et mettre en débat les indicateurs de gestion des rivières. |
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