Sources électroniques à base de nanotubes de carbone - Application aux tubes amplificateurs hyperfréquence.
La compréhension des propriétés de la matière à l'échelle atomique, résultats d'avancées considérables en sciences et en technologies de la fin du 20e siècle, est l'un des progrès qui a conduit au développement de ce que l'on appelle aujourd'hui les nanosciences. Richard P....
Main Author: | |
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Language: | FRE |
Published: |
Ecole Polytechnique X
2006
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Subjects: | |
Online Access: | http://pastel.archives-ouvertes.fr/pastel-00001904 http://pastel.archives-ouvertes.fr/docs/00/50/35/15/PDF/Minoux.pdf |
Summary: | La compréhension des propriétés de la matière à l'échelle atomique, résultats d'avancées considérables en sciences et en technologies de la fin du 20e siècle, est l'un des progrès qui a conduit au développement de ce que l'on appelle aujourd'hui les nanosciences. Richard P. Feynman, prix Nobel de physique en 1965 pour ses travaux sur l'électrodynamique quantique, avait prophétisé en 19591 l'étendue des possibilités qu'ouvrirait la manipulation de la matière atome par atome. Les lois de la physique macroscopique ne s'appliquent plus à cette échelle et les comportements deviennent purement quantiques. On peut modifier les propriétés de la matière ouvrant ainsi la voie à des applications futuristes. Les nanotechnologies – concepts et procédés des nanosciences en vue d'applications - ont déjà de vastes champs d'applications en microélectronique et en matériaux par exemple. Et les possibilités vont en s'accroissant, pour ces domaines spécifiques mais aussi en biotechnologie, en photonique et dans les technologies de l'information laissant supposer des retombées sociales et économiques énormes2. Pourtant, on utilise depuis longtemps des nanomatériaux (verres, céramiques, ...) et les chimistes font appel à des molécules de tailles diverses. Peut-on alors considérer cette science comme nouvelle? En fait, ce qui a changé, c'est la possibilité, grâce au développement de nouveaux outils, de fabriquer, d'observer, d'analyser, d'assembler, de comprendre des nano-objets qui sont les briques de base des nanotechnologies. Dans ce manuscrit, nous nous intéresserons au cas particulier de nouvelles molécules: les nanotubes de carbone qui sont étudiés pour leurs remarquables propriétés. Leurs qualités de transport électronique en font des candidats pour la réalisation de transistors, de diodes ou encore de mémoires RAM. Leurs propriétés mécaniques et leur faible poids en font un éventuel composant de matériaux composites. Enfin leurs rapports d'aspect élevés dus à des longueurs micrométriques et des rayons nanométriques en font des sources d'électrons par émission de champ très intéressantes qui peuvent servir dans des écrans plats ou pour la microscopie électronique. C'est cette dernière application des nanotubes de carbone comme source d'électrons dans le vide qui est à l'origine de tout ce travail de thèse et fait l'objet du présent mémoire. Lorsque le transistor fut inventé par Bardeen, Brattain, et Shockley dans les années 19503 et que les premiers circuits intégrés ont fait leur apparition dans les années 19604, il semblait que le temps de l'électronique sous vide était compté. L'émission dans le vide par effet thermoïonique nécessite en effet de chauffer une cathode à environ 1000°C pour émettre des électrons. Pourtant en 1961, Shoulders du Stanford Research Institute (SRI) a l'idée d'un nouveau dispositif, de taille micrométrique, basé sur l'effet tunnel, comme une nouvelle source d'électrons5. Et ce sont les technologies de fabrication issues de la microélectronique qui vont permettre la fabrication de ces nouvelles sources d'électrons dites froides (car fonctionnant à température ambiante) basées sur ce principe purement quantique. Ainsi, lorsqu'en 1968, Spindt, engagé par Shoulders au SRI, publie ses premiers résultats sur la fabrication de pointes pyramidales en molybdène6, il déclenche un intérêt général pour ce type d'émetteurs et un regain pour l'électronique sous vide avec des applications visées telles que les écrans plats, les dispositifs hautes fréquences, ... Ainsi les premières années de cette communauté scientifique seront quasi exclusivement dédiées à l'amélioration de ce type spécifique d'émetteurs. L'une des plus belles réalisations étant la démonstration du fonctionnement en 1993 d'un écran plat 6" basé sur cette technologie7. A partir de 1994 cependant, cette communauté va petit à petit se tourner vers de nouveaux matériaux plus robustes, et également plus faciles et moins chers à produire. C'est en 1995 que Rinzler8 et de Heer9 vont démontrer l'émission d'électrons à partir de nanotubes de carbone, une nouvelle forme du carbone découverte en 1991 par Iijima10. Les propriétés géométriques, électriques, mécaniques, chimiques de ces objets en font en effet un matériau remarquable pour l'émission de champ. Ils sont de plus extrêmement robustes et les procédés de croissance permettent la fabrication à bas coût (sur de larges surfaces) de cathodes très performantes. De plus, l'un des gros inconvénients des pointes Spindt pour une utilisation à hautes fréquences est la proximité entre la pointe et la grille d'extraction (~1μm) qui est imposée par le procédé de fabrication et conduit à des capacités élevées limitant ainsi la fréquence d'utilisation. Avec les nanotubes de carbone, ce problème est levé avec la possibilité d'écarter la grille à des distances plus importantes (~100μm) et ainsi des fréquences de coupure plus élevées. Avec des facteurs d'amplification beaucoup plus grands que les pointes pyramidales, on conserve également un pilotage avec des tensions raisonnables. L'étude des propriétés d'émission de champ des nanotubes de carbone constituera ainsi l'essentiel du présent manuscrit où l'on essaiera également de montrer les avantages de ces sources par rapport à d'autres matériaux. Le but visé ici étant l'utilisation de ces sources dans des tubes amplificateurs hyperfréquence. L'idée de base qui a conduit à cette étude est la suivante: les cathodes thermoïoniques conventionnelles donnent satisfaction et font toujours l'objet de développement. Il n'y a donc actuellement aucune raison de les remplacer dans les tubes. Cependant on perçoit le besoin d'une nouvelle technologie pour fréquences élevées (>30GHz). Le rêve des concepteurs de tubes électroniques est ainsi de remplacer ces cathodes chaudes par des cathodes froides dont l'intégration devrait permettre d'une part de réduire la taille et le poids d'au moins un facteur 2 et surtout d'améliorer nettement le rendement, en particulier à hautes fréquences. La fréquence de coupure des pointes type "Spindt" étant trop faible pour adresser cette zone de fréquence (une démonstration de modulation à 10GHz en 199711 est encore aujourd'hui l'état de l'art sur ces dispositifs), les nanotubes de carbone apportent une technologie intéressante et ambitieuse pour remplacer les cathodes chaudes. Mais pour cela il faut développer une source qui puisse émettre une certaine densité de courant avec une certaine durée de vie. C'est ce qui a fait l'objet de ce travail: concevoir, développer, comprendre, optimiser une source à émission de champ à base de nanotubes de carbone. La première partie introduira le monde des tubes hyperfréquence et des sources électroniques. Nous essaierons de comprendre les limites des technologies actuelles et l'intérêt que présentent ces nouvelles sources à nanotubes de carbone. La deuxième partie se focalisera sur le matériau. Tout d'abord via ses exceptionnelles propriétés et ses méthodes de fabrication. Un état de l'art de son utilisation comme source électronique nous permettra de comprendre l'orientation que nous avons choisie pour réaliser des sources performantes. On présentera les principales réalisations expérimentales. La troisième partie sera consacrée aux mesures d'émission de champ sur nanotubes de carbone individuels. On présentera l'outil spécifique qui a servi à ces mesures et les principaux résultats obtenus qui nous ont permis de comprendre et d'améliorer les performances. La quatrième partie sera quand à elle consacrée aux mesures en émission de champ sur des réseaux de nanotubes. On présentera les principaux résultats obtenus. Ceux-ci seront couplés aux résultats individuels pour montrer qu'il est possible de prédire le comportement d'une cathode. La cinquième partie démontrera la modulation d'un faisceau électronique en hyperfréquence à partir d'une cathode à nanotubes de carbone. Tout d'abord les résultats obtenus dans une diode à 1.5GHz. Puis ceux obtenus dans une triode à 30GHz. Enfin nous conclurons sur tous ces résultats, ce qu'ils apportent sur la compréhension de ce nouveau type de sources et les perspectives qu'ils ouvrent quand à l'utilisation de cellesci dans des dispositifs commerciaux. |
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