Summary: | La présente proposition de communication se donne pour but d'étudier les relations interdiscursives et les écarts conceptuels observables dans deux grammaires du XVIIIe siècle : la grammaire de l'allemand de Johann Jakob Bodmer (Grundsätze der deutschen Sprache, 1768) et la grammaire du français de l'Abbé Girard (Les Vrais Principes de la langue françoise, 1747). Les similitudes que présentent les deux discours grammaticaux sont en effet particulièrement perceptibles, et l’adoption par Bodmer des « méthodes et des principes de l'Abbé Girard »(Bodmer, 1768, Préface) fait de l'écrivain et critique littéraire suisse le premier grammairien de l’allemand à introduire la distinction entre parties d’oraison (« Bestandtheile der Rede ») et membres de frase (« Glieder der Rede »).
Cependant, à trop se concentrer sur les similitudes que présentent les deux discours, on risque de passer sous silence une innovation majeure qui apparaît, chez Bodmer, dans le chapitre consacré à la syntaxe. L’écrivain suisse introduit en effet une des toutes premières distinctions entre les notions de coordination et de subordination dans son traitement syntaxique de la conjonction. Ce constat pousse alors le lecteur à observer plus précisément les écarts qui peuvent être relevés par rapport aux catégories descriptives établies par Girard, aussi bien dans le chapitre sur la syntaxe que dans le traitement des parties du discours. On s’intéressera ainsi non seulement à l’impact que la spécificité de la langue allemande peut avoir sur le cadre descriptif préexistant, mais aussi à l’analyse des initiatives théoriques réalisées par Bodmer. Le traitement syntaxique de la conjonction peut, en effet, être perçu comme une initiative double : il constitue d’une part un « écart » par rapport au discours de Girard relativement auquel les Grundsätze se construisent, et il participe d’autre part d’une évolution théorique importante du point de vue de l’histoire du traitement de la conjonction dans le discours grammatical européen.
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