La frontière entre « judaïsme » et « aryanisme ». Logique antisémite, contentieux juridique et pratiques bureaucratiques autour du classement des « demi-juifs » en France occupée (1940-1944)

Sous l’Occupation, le statut des juifs ne prévoit pas, contrairement à la législation nazie, un statut intermédiaire pour les individus ayant une ascendance « mixte » (nommés « demi-juifs » par l’administration). En France, pas de « métis » au premier ou au deuxième degré ; on est soit juif, soit no...

Full description

Bibliographic Details
Main Author: Laurent Joly
Format: Article
Language:fra
Published: Centre de Recherches Historiques 2020-09-01
Series:L'Atelier du CRH
Subjects:
Online Access:http://journals.openedition.org/acrh/10751
Description
Summary:Sous l’Occupation, le statut des juifs ne prévoit pas, contrairement à la législation nazie, un statut intermédiaire pour les individus ayant une ascendance « mixte » (nommés « demi-juifs » par l’administration). En France, pas de « métis » au premier ou au deuxième degré ; on est soit juif, soit non-juif. Or, les critères pour définir l’appartenance ou non à la « race juive » des « demi-juifs » varient selon les textes allemands et français, la jurisprudence des tribunaux et la pratique des fonctionnaires spécialisés. La frontière entre « juif » et « non-juif » est ténue, souvent arbitraire, conditionnée par l’appartenance religieuse, un divorce, un mariage... Être classé du « bon » ou du « mauvais » côté de la « barricade » (selon la formule de l’expert ethno-racial auprès de la Préfecture de police de Paris et du commissariat général aux Questions juives, George Montandon) est, bien souvent, un enjeu de vie ou de mort. L’administration (« service juif » de la PP et CGQJ pour l’essentiel) et les tribunaux ont eu à statuer sur des milliers de « cas douteux ». Plus de 11 000 « certificats de non-appartenance à la race juive » ont été délivrés par le CGQJ, au bout d’enquêtes minutieuses. L’objet de cette contribution est de réfléchir sur les catégories mobilisées par les agents de l’État pour trancher sur ces cas limites, et de comprendre les ressorts de cette quête obstinée afin de déterminer la frontière, juridique et politique, entre « juif » et « non-juif ».18 septembre 2020.
ISSN:1760-7914