Summary: | En français parlé, un SN en tête de phrase peut être repris par un pronom co-référent dans la construction verbale qui le suit (ma mère<sub> </sub> elle <sub> </sub> est née en avril). Du point de vue syntaxique, ce sujet est ‘disloqué’ en dehors du champ de la rection verbale ; du point de vue prosodique, il est assorti d’une frontière prosodique majeure, et du point de vue pragmatique, il joue le rôle de topique de phrase par excellence. Cette description a été remise en cause par certains auteurs. Sur le plan morphosyntaxique, on a affirmé qu’en français parlé les propriétés du clitique ne seraient pas celles d’un pronom, mais d’un affixe verbal, et donc que le sujet ne serait pas disloqué (Berrendonner 1993, Zribi-Hertz 1994). Quant à la prosodie, on a remarqué que le SN disloqué n’est pas toujours suivi d’une frontière majeure (Fradin 1990). Selon certains auteurs (e.g. Lacheret-Dujour & François 2004) le degré de force de la frontière serait inversement proportionnel au niveau d’activation du topique dans le discours. Selon d'autres (e.g. Frascarelli & Hinterholzl 2007) une prosodie particulière serait associée à l'interprétation contrastive du topique. Dans notre article, nous testons ces hypothèses avec une analyse pragmatique et prosodique des SN avec ou sans reprise dans des séquences extraites de deux corpus de français parlé spontané. Le codage pragmatique consiste en classifier les topiques en actifs, semi-actifs, non plus actifs (réintroduits) et contrastifs. Quant au codage prosodique, il consiste en la détection automatique des proéminences accentuelles sur la base des variations de f0 et durée et de la présence des pauses. Les résultats montrent qu’il y a un rapport significatif entre frontière prosodique forte et topique réintroduit dans les sujets avec reprise, mais pas dans les sujets sans reprise. Il y a donc un chevauchement, au moins dans une partie de nos données, entre marquage prosodique, syntaxique et pragmatique. Quant à la fonction de la prosodie, elle semble être de marquer un changement de topique, ainsi que de signaler une structuration particulière du discours, où le topique courant est lié à un discours précédent ensuite repris. En revanche, la proéminence prosodique n'est pas associée de façon significative au contraste. D’autre part, l'interprétation contrastive n'est associée non plus, dans nos données, à la présence du clitique.
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