L’appariement forme-fonction en FL2 : le développement de l’emploi des formes verbales du passé et la primauté du marquage de l’aspect

Une dimension clef du processus d’acquisition d’une langue seconde (L2) est la mise en relation d’une forme et d’une fonction. Cet appariement forme-fonction ne se met néanmoins en place que fort tardivement. Ainsi, pour exprimer certaines fonctions, l’apprenant L2 a dans un premier temps recours à...

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Bibliographic Details
Main Authors: Michot Marie-Eve, Pierrard Michel
Format: Article
Language:English
Published: EDP Sciences 2016-01-01
Series:SHS Web of Conferences
Online Access:http://dx.doi.org/10.1051/shsconf/20162710008
Description
Summary:Une dimension clef du processus d’acquisition d’une langue seconde (L2) est la mise en relation d’une forme et d’une fonction. Cet appariement forme-fonction ne se met néanmoins en place que fort tardivement. Ainsi, pour exprimer certaines fonctions, l’apprenant L2 a dans un premier temps recours à des principes discursifs et sémantico-pragmatiques, à des structures préfabriquées et à des formes intermédiaires avant de grammaticaliser progressivement ses énoncés et enfin d’utiliser adéquatement la grammaire pour marquer, entre autres, les différentes catégories grammaticales (nombre, genre, temps, etc.). Bref, le processus acquisitionnel passe d’un stade premier de lexicalisation vers un stade de morphologisation, qui ouvre la perspective d’un emploi adéquat, d’un appariement donc entre la forme et sa/ ses fonction(s) (Noyau 1997). En ce qui concerne l’analyse du processus d’appropriation des formes verbales, les études acquisitionnelles se sont avant tout intéressées à l’appariement entre les formes conjuguées des verbes et l’expression du temps et de l’aspect. En français, le marquage de ces deux fonctions est intrinsèquement lié. En particulier, l’exploitation émergente des conjugaisons du passé (passé composé, imparfait, passé simple) offre un champ d’observation particulièrement riche qui a suscité de nombreuses études (cf. e.a. Kaplan 1987 ; Noyau et al. 1995 ; Kihlstedt 2002 ; Ayoun 2001, 2004, 2005). Plusieurs études ont ainsi indiqué que les formes de la conjugaison du passé se limitent dans un premier stade au passé composé qui est par conséquent souvent suremployé à des contextes où devraient apparaître des formes de l’imparfait. L’imparfait s’impose ensuite progressivement, d’abord avec les verbes être et avoir et plus tard avec les autres verbes lexicaux. Le plus-que-parfait est la conjugaison du passé qui surgit en dernier lieu dans l’interlangue des apprenants de français L2 (FL2). La contribution se donne dans un premier temps pour but de décrire le développement des formes de la conjugaison du passé dans l’interlangue d’apprenants néerlandophones du FL2 à l’aide d’un corpus oral. Elle examinera ensuite les fonctions temporelle et/ ou aspectuelle que ces formes verbales y remplissent afin d’étudier leur appariement forme-fonction. La contribution tentera plus particulièrement de répondre aux questions suivantes, issues de l’hypothèse aspectuelle d’Andersen (1986, 1991) : L’aspect est-il effectivement marqué avant le temps en FL2 ? L’imperfectif apparaît-il après le perfectif en FL2 ? Les apprenants marquent-ils d’abord le perfectif avec des verbes téliques, et seulement ensuite éventuellement avec des verbes atéliques ? L’imperfectif est-il d’abord utilisé avec des verbes atéliques et seulement après avec des verbes téliques ? Les données de notre corpus confirment prudemment l’importance et la primauté du marquage de l’aspect dans l’interlangue des apprenants FL2. Cette primauté de l’aspect permet sans doute aussi de comprendre la primauté des formes du passé composé, qui s’opposent par l’aspect accompli au présent qui indique l’accomplissement. Le surgissement de l’imparfait semble aller de pair avec la prise en compte de l’expression du temps passé par le passé composé et donc aussi de la nécessité d’introduire une dimension d’accomplissement au passé. L’analyse détaillée des lexèmes verbaux convoqués indique que leur aspect lexical inhérent semble aussi jouer un rôle dans l’ordre développemental des conjuguaisons du passé, bien que certaines affirmations de l’hypothèse aspectuelle d’Andersen n’aient pas pu être pleinement confirmées.
ISSN:2261-2424