Jouer et se jouer de la fiction : Diderot et Ricœur

Temps et récit de Ricœur repose, on le sait, sur une approche aristotélicienne du récit. La fiction ordonne, de manière différée, le tissu épars de la matérialité du monde sensible ; elle se constitue par la médiation du discours en objet de connaissance. De fait, Ricœur écarte, en toute logique, le...

Full description

Bibliographic Details
Main Author: Adrien Paschoud
Format: Article
Language:fra
Published: Laboratoire Interdisciplinaire Récits Cultures Et Sociétés 2021-07-01
Series:Cahiers de Narratologie
Subjects:
Online Access:http://journals.openedition.org/narratologie/11975
Description
Summary:Temps et récit de Ricœur repose, on le sait, sur une approche aristotélicienne du récit. La fiction ordonne, de manière différée, le tissu épars de la matérialité du monde sensible ; elle se constitue par la médiation du discours en objet de connaissance. De fait, Ricœur écarte, en toute logique, le caractère métafictionnel qui caractérise certaines œuvres littéraires. Dès lors qu’un récit fait apparaître ses propres rouages, indépendamment (ou en marge) de l’intrigue qui s’y développe, l’illusion mimétique est rompue : les signes se substituent aux choses, contrevenant ainsi à la restitution de l’ordre du réel. Il semble donc a priori impossible de faire tenir ensemble fiction et métafiction. Or, l’examen d’un corpus ciblé de Diderot nous permettra de visiter à nouveaux frais, dans un premier temps, ces présupposés. Deux récits nous intéresseront : La Religieuse et Mystification. Ils ont l’un et l’autre pour origine un leurre – une mystification, précisément, qui donne lieu à une imbrication étroite entre le factuel et le fictionnel. Surtout, ces récits ont en commun de briser l’illusion mimétique, et, dans un mouvement exactement symétrique, d’exhausser le remarquable pouvoir de la fiction comme médiation du vrai. L’analyse interne de certaines des composantes métafictionnelles de La Religieuse et de Mystification nous conduira, dans un second temps, à établir un dialogue à distance entre Diderot et Ricœur. Il s’agira alors de préciser la nature de ces « jeux » fictionnels – non pas, bien sûr, en vue de se livrer au jeu (pour ainsi dire) des bons et des mauvais points, mais plutôt de s’attacher à la manière dont Ricœur a veillé à maintenir la primauté donnée à l’opération référentielle – et par conséquent ontologique – qui est inhérente, selon la démarche qui est celle de Temps et récit, à la mimèsis.
ISSN:0993-8516
1765-307X