Summary: | Dans le cadre de cet article nous reviendrons sur le sens du terme d’«addiction» qui remplaça, il y a quelques années, celui de «toxicomanie». De nos jours, le discours politiquement correct ne stigmatise plus. Il ne présente plus, n’accuse plus. Il culpabilise et met l'accent sur la fonction consommatrice et la relation d’un individu aux pratiques et aux productions des plaisirs. On parle désormais d'usager, de consommateur. Ce personnage décrit par la vulgate contemporaine est distinctement inclus dans le système marchand des biens et des services. Que cachent ces arguties lexicales ? Quelle est le sens de cette démarche économico-politique qui privilégie la fonction sur le sujet ? Quel est donc ce clivage dans la définition de pratiques qui, bien que collectives, n'en restent pas moins singulières et, par conséquent, inaliénables ? L'addiction n'existe pas sans un référentiel théorique, politique et économique, sans un background à partir duquel certains sens se créent et s'échangent. Dans ce mouvement, l’addiction tend à s’effacer, en même temps que la subjectivité, derrière une brume sémantique qui hésite entre la stigmatisation de pratiques pathologiques singulières et comportements transgressifs, apparemment détachés des échanges. Dans ce cadre, nous interrogerons ces théories qui du semblant et de l’apparence proposent un sens à une fonction au détriment de ceux qui pourraient l’habiter ? Comment le sujet est-il déshabillé de sa consistance, de ses souffrances, de sa jouissance, et finalement de sa quête de bien-être ou de mal-être, au profit de discours qui n’entendent que l’enchaînement des actes comme preuves de qui il serait ? Le retrait de la composante maladive de l’addiction a dénaturé sa réalité. Sans la notion de mal ou le concept de maladie, comment faire valoir le bien et par conséquent redonner sens à la notion de «bien-être» ? Les lumières des discours du panoptisme contemporain repoussent les ombres de la subjectivité et de la dialectique. A leur place, elles proposent l’évidence, la preuve, les faits d’une fonction sociale sans jamais en questionner le sens ou les sens. Derrière cette pratique du discours se joue peut-être tout simplement le meurtre de la question dans les sociétés dites «postmodernes».
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